26 avril 2020

SUNDGAU : LES CARPES POUR GARDER LA FRITE


Dans la France confinée, la vente à emporter s'impose. Les restaurateurs sundgauviens s'adaptent.




Le 19 mars devait être jour de fête et de retrouvailles à Hirtzbach.
La salle des fêtes du village 4 fleurs avait été réservée pour le lancement des Carpailles, cette courte saison de la carpe revisitée par les restaurateurs et le 45e anniversaire de leur association « Le Sundgau, Routes de la Carpe frite ». Malheureusement, la crise sanitaire a eu raison des agapes, tandis que le député Jean-Luc Reitzer, ambassadeur national du produit emblématique du Sud-Alsace était malade. Depuis le 15 mars d'ailleurs, les cuisines des restaurants étaient éteintes. Mais en avril, les cuisiniers rallument le gril. Certains du moins qui n'attendent pas que l’État leur permette de nouveau de recevoir.



Au pays de la carpe frite, plusieurs établissements se sont organisés pour la vente à emporter. C'est le cas du Restaurant de la gare Munzenberger de Hirtzbach. Frédéric Stantina, le chef, se définit comme un hyperactif. Et se bat pour sauver son entreprise.
Dans le Sundgau, la carpe frite est une institution qui déplace des autocars de Strasbourg. Cette clientèle, Fred ne sait pas quand il la retrouvera. Le Vendredi saint, férié en Alsace, la carpe est une évidence. Le restaurant de Hirtzbach a commencé à retravailler pour les Rameaux. 270 repas assurés. Près de 500 le vendredi suivant dont une quarantaine pour l'hôpital. Le 19 avril, on est venu chercher de la carpe, des asperges au jambon, des rognons et du feuilleté aux fraises préalablement commandés.
Le restaurant a pu faciliter et sécuriser le cheminement des clients dans la cour, des gastronomes, des fidèles, des amateurs de carpe frite témoignant solidarité et reconnaissance à la vieille maison.


Il a fallu répartir les tâches aussi. Emilie, la fille de Fred, assure l'accueil et la caisse. En cuisine s'affairent le gendre Marco et sa brigade restreinte. Le chef court entre la prise de commande et les fourneaux. Les clients ont pensé à emporter qui un sac qui une cagette. Le Hirtzbach coule dans son lit renaturé, la clientèle patiente avec sérénité. Elle va passer un bon moment à table, en attendant de revenir dans la grande salle de « la Gare ».

Les carpes sans à commander avec ou sans arêtes. Elles sont proposées dans leur habit de semoule, pavot et sésame. Royales.
Avec leur accompagnement et le rince-doigt à l'effigie de la maison.


Réservations 03 89 40 93 27





22 avril 2020

GRIMM ET MASQUES




Valérie


La dernière fois que j'étais entré dans le bâtiment, c'était pour un achat de dépannage alimentaire chez l'épicier turc. Depuis le 12 novembre, l'ancienne supérette a fait place à un commerce de tissus et de réparation de machines à coudre. C'est l'univers de « M. Grimm », Stéphane Armao, et de sa conjointe Valérie. Depuis la mi-avril, l'endroit est redevenu accessible au public, car maillon local de la chaîne du masque sanitaire.


Stéphane est un expert de la machine textile. Son dada, ce sont les machines à coudre d'un certain âge, qu'il remet en route quand elles tombent en panne. Il ne manque pas de travail. 


Des bénévoles de la Croix-Rouge des  Trois-Frontières et Stéphane

Le 15 mars, tout s'était brutalement arrêté pour Grimm. Commerce non essentiel, il ne pouvait pas rouvrir. Mais Valérie est couturière et bénévole à la Croix-Rouge. En quelques heures, le couple s'est résolu à ne pas rester les bras croisés. Il dispose du tissu, des élastiques et de tout le matériel pour confectionner des masques quand la France en manque cruellement encore. Pendant trois semaines, une nouvelle activité se met en place dans le magasin, la confection. Dans un premier temps, les gérants qui ont le cœur sur la main fabriquent et contribuent à réaliser des masques qu'ils distribuent ça et là, aux personnes âgées de leur village, à une famille en quatorzaine, aux hôtesses de caisses. 


2€50 le masque made in Alsace

Mais l'entreprise a des charges. Stéphane obtient l'autorisation d'ouvrir à partir du 14 avril et ne remerciera jamais assez le maire d'Altkirch par ailleurs investi avec le conseil départemental. Dès lors, une queue se forme tous les matins pour chercher masques, matériel et tissu. Une clientèle essentiellement féminine, comptant de nombreuses couturières. Dans le même temps, la petite entreprise de Stéphane qui a réussi à garder sa clientèle haut-sundgauvienne après son départ de Waldighoffen a augmenté la cadence. Elle produit aujourd'hui plusieurs centaines de masques en tissu par jour, vendus 2€50 pièce. Le bouche-à-oreille et Facebook ont généré un trafic inhabituel sur le parking de l'ancien supermarché Farine sur lequel je jouais enfant. En descendant dans la « caverne aux tissus », au sous-sol, je suis étonné de l'espace. Des dizaines de milliers de mètres de tissus européens y reposent sur 350 m2. Gamin, j'avais mis mon nez dans le bâtiment en construction, je me souviens presque de l'odeur de béton. Le supermarché avait pris la place d'un ensemble comprenant un ancien café-restaurant, un garage désaffecté et la maison d'habitation au fond...
Depuis, les aventures commerciales se sont succédé. Grimm a quitté la vallée de l'Ill pour un site centralisé et plus spacieux dans ma rue du 3e Zouaves de toujours.


Fabienne


Depuis la réorientation de l'activité, les journées de Stéphane et Valérie sont interminables. Il faut gérer la production avec de petites mains dont celles de la joviale Fabienne, répondre à la demande et aux sollicitations de donneurs d'ordre. La confection artisanale d'Altkirch intéresse des entreprises importantes. 

Stéphane est convaincu qu'on est parti pour garder le masque un certain temps. Avec la montée en charge de la production, il n'exclut pas de monter un atelier plus important.
Avec le tissage Emanuel Lang voisin de quelques kilomètres, le pôle textile sundgauvien reprend des couleurs. Une éclaircie dans le ciel tourmenté du Sud-Alsace.

Grimm Machine à coudre à ALTKIRCH (68)



#grimm#machineacoudre#masquetissu#coronavirus



Caroline Jaegy est graphiste. Depuis 20 ans, elle place son trait d'humour dans la presse jeunesse et adulte. Caro commet régulièrement des dessins autour du masque. Elle participe à la grande chaîne solidaire contre le Covid-19.

Caro


7 avril 2020

Le journal du confinement semaine 3

Dom Monsch  + (photo de son Facebook)

Mardi 31 mars 2020. 15e jour.
Nous entrons dans la troisième semaine de confinement.
Le soleil accompagne mes premiers jours de congés. Le corona emporte aussi les célébrités, dont Pape Diouf figure du football et chez nous le distingué Albert Fillinger, qui semble avoir été de tous temps président des philatélistes de Mulhouse. Ce jour nous apprenons aussi la disparition de Pierre Benichou, qui ne s'est pas réveillé. Ce trublion des Grosses Têtes laisse orphelin Laurent Ruquier et ses compères.

Mercredi 01 avril. Jour 16.
Le poisson est rare cette année. Le corona nous ravit jusqu'au sourire. Justement, je pense trouver du vrai poisson à Hirtzbach, si j'en crois une annonce de « Dame Nature ». Hélas, point de vendeur devant le magasin bio. Le patron me reconnaît et me présente à son employée. Calogero chante la fin du monde. Ambiance. Je vais tenter ma chance à Hirsingue. On fait la queue devant Leclerc. Tiens, toujours ce 4x4 de la gendarmerie en patrouille. Ce sera donc « L’Îlot fermier ». Bonne pioche, les clients y sont rares ce matin, c'est l'occasion d'échanger avec le boucher et l'hôtesse de caisse dans ce magasin branché sur DKL. L'eau de Niederbronn est coûteuse, mais les bulles ont un prix.
Une semaine qu'Amour m'a mis en quarantaine, sans que je ne sois malade.

Vendredi 03 avril. Jour 18.
La nouvelle tombe dans l'après-midi. Dominique Monsch a été vaincu par le Covid-19. Il avait une peur bleue de ce corona, il s'en est protégé, mais ce diable de virus a fini par le happer pour l'anéantir. A 66 ans commence la vie selon Udo Jürgens. Dom était un ancien collègue unanimement apprécié. Sa retraite a été courte. Un chauffard venu de loin lui a coupé la route 66.
Un peu plus tôt maman m'apprenait le départ à 77 ans de notre ami Philippe Sauner, l'abbé de mon enfance. Il avait la discrétion des scientifiques. L'empathie des humbles. Le sourire du Christ.

Samedi 04 avril. Jour 19.
Sauvons les producteurs de proximité. Ce matin, je vais faire mon marché à Illfurth, au magasin de la ferme Wolf-Boetsch. On attend son tour sur le parking. Trois clients au plus à l'intérieur, autant de vendeurs. Le printemps commence, le choix est limité.
Deuxième étape, la supérette Carrefour. Un type masqué derrière moi ne respecte pas le mètre recommandé. L'homme devant moi se voit prier de restituer un paquet de papier toilette. Heureusement, la vendeuse est toujours avenante.
Dernière étape chez mon boucher de proximité. Une affichette tient lieu de faire-part de décès. Le fondateur s'est éteint qui s'était retiré en 1993. En attendant d'entrer, je vois arriver le maire réélu d 'Aspach. On échange sur les municipales. Et sur la gestion des affaires courantes, faute de mieux.

Dimanche 05 avril. Jour 20. Les Rameaux.
Les chrétiens entrent dans la Semaine sainte. Cette année, nous n'aurons pas de brins du marché ou de la paroisse.
Mais sous le soleil d'avril croît un arbrisseau sur la terrasse. Il sera le rameau symbolique de 2020. Il fait toujours beau.
Le week-end reste culinaire dans ma nouvelle vie. J'ai galéré avec la pâte à bretzel, tenté de retrouver le goût hongrois du goulasch mais accompli les feschschnaka de truite fumée. Cette semaine, j'ai encore proposé des œufs brouillés à Eloi. Les recettes simples sont heureuses aussi.

Lundi 06 avril. Jour 21.
Ma deuxième semaine de congés commence.
Je me tiens encore à distance de l'actualité anxiogène et des discours malsains voire assassins des réseaux sociaux. Malheureusement, les faits nous cognent. Dans l'après-midi, nous savons que nous ne reverrons plus Jean-Marie Zoellé. Le maire brillamment réélu à Saint-Louis a été battu par le corona dans son hôpital de Bonn.
Porte de France, le printemps fane les lys.

31 mars 2020

Le journal du confinement semaine 2



Mardi 24 mars 8e jour.

A midi, nous entrons dans la deuxième semaine de confinement en France.
Un contact téléphonique professionnel. Nina, l'attachée de presse de la Ville de Mulhouse qui me met en relation rapidement avec Paul Quin, l'adjoint à la sécurité, à ma demande, pour une interview sur le couvre-feu instauré depuis dimanche. Brunstatt-Didenheim et Zillisheim emboîteront le pas à la ville centre. 

Il faut se nourrir. Un saut à la boulangerie Marzin, où n'entre qu'un client à la fois. Fini la queue du samedi matin dans ce petit commerce. Deux vendeuses dont une avec masque, la patronne dans le fournil. Le comptoir protégé par une vitre. Ambiance de guerre. Près de chez moi aussi, le boucher. Des cagettes nous éloignent de la vitrine. Deux vendeuses, une cliente quand j'entre. L'effectif est diminué par la maladie. A cause de cela, ma petite femme met encore plus de distance entre elle et moi désormais. Parfois il vaut mieux se taire. Le corona nous isole tous, il me sépare maintenant de mon amour pour un temps qu'elle déterminera.
Ce jour j'interviewe aussi Jean-Marie Claudepierre, représentant la Fédération des marchés de France dans les Vosges. Dans les restrictions nouvelles, les marchés ouverts et couverts sont fermés sauf dérogation préfectorale. Dans le Haut-Rhin, Michèle Lutz venait de nous dire que le préfet tenait à garder le marché de Mulhouse, car site d'achats de première nécessité. En début d'après-midi, les derniers commerçants plient leurs stands. Le représentant de l'Etat dira non par ailleurs aux sollicitations du maire de Colmar. Une mauvaise nouvelle de plus, pour de petits producteurs sans débouché.

Mercredi 25 mars  9e jour

Emmanuel Macron à l'hôpital de Mulhouse.
On le rabâche,le Haut-Rhin et d'abord Mulhouse dans l’œil du cyclone Corona en France depuis ce rassemblement de Bourtzwiller. Le chef de l'Etat se rend au GHRMSA en fin d'après-midi, précisément à l'EMR sur le parking. Il porte pour la première fois un masque. Jean Rottner s'est fait excuser, souffrant de symptômes suspects. Le président de la République profite du JT de 20H pour faire son allocution. Nos radios n'ont pas été invitées à couvrir ce déplacement et ça se comprend. 

Auparavant, j'interroge mon curé largotin sur son quotidien. Le père Justin a célébré sa dernière messe avec des fidèles le 14 mars. Depuis, il n'a vu que des familles en deuil. Les prêtres catholiques sont un peu plus seuls que d'habitude. Et l'Ivoirien n'a jamais connu l'interdiction d'office même dans les heures sombres de la Côte.
Fin d'après-midi avec le réseau RTL2-Fun. Nouvelle visioconférence avec les confinés des musicales du groupe M6.

Jeudi 26 mars  10e jour

Reportage de proximité. Ce matin, je visite la boulangerie Wininger, un des commerces alimentaires artisanaux d'Altkirch. La maison fait aussi épicerie et bureau de tabac. Surtout il s'agit de suivre brièvement François dans sa tournée. Il aura fallu la crise sanitaire pour que je revoie Frantz, à peine plus âgé que moi. Je le retrouve à Aspach. Les gendarmes disposés au rond-point du cimetière ne me contrôlent ni à l'aller ni au retour. 
Vers 08H50, un appel inédit du Sud de la France, quelques jours après celui d'Anne et Gérard de Toulon. C'est Blandine ! J'ai reconnu sa voix d'entrée. Elle qui a quitté l'Alsace voilà trente ans...Le moment est mal choisi pour papoter, du reste mon ancienne collègue souhaite partager une information médicale d'un praticien varois, mais celle-ci me paraît trop technique pour être comprise. Blandine s'adresse à moi car elle cherchait "un journaliste alsacien, ses connaissances n'étant plus de ce monde". Elle-même doit au moins être sexagénaire.

Vendredi 27 mars  11e jour
Dernier jour avant les congés.
Décidément je ne fais rien comme tout le monde. J'avais posé des vacances pour la période précédant Pâques, ayant travaillé sans discontinuer depuis la mi-août. Sauf que le corona a surgi et voilà que le confinement est prolongé jusqu'au 15 avril. Au moins bis. On fera avec. Je me suis levé aux aurores comme d'habitude,j'ai vite acquis la nouvelle feuille de route quotidienne. Un appel, celui du chef comptable. En temps normal, c'est lui que les collègues appellent.
Vers 19H, j'ouvre une nouvelle fenêtre. Je suis, semble-t-il, en vacances pour deux semaines. 


Samedi 28 mars  12e jour 

Le bureau de poste d'Altkirch est fermé pour deux semaines, la boîte aux lettres relevée trois fois par semaine. 
Je fais mes courses alimentaires à Spechbach-le-Bas aux Champs de l'Ill, produits fermiers, adresse rappelée à juste titre par mon confrère Jean-Michel Hell. Le caissier est à l'abri derrière sa vitre, il désinfecte à tour de bras. Cinq clients admis au plus, la moitié porte le masque.
Je me demande d'ailleurs comment toutes ces personnes ont accès à cet équipement quand il est dirigé prioritairement vers les professionnels de santé.
Le reste de mes achats au supermarché, toujours bien approvisionné et sans cohue. Les hôtesses de caisse ont le casque lourd,ce genre de protection utilisée quand on débroussaille.

Le samedi est jour de cuisine.
J'attaque enfin le livre dédié au regretté Jean Schillinger. La crème brûlée.


Dimanche 29 mars  13e jour

Deuxième dimanche sans messe physique. Je rejoins la diffusion Facebook de St-Nicolas-du-Chardonnet. Je pense à Vincent, envoyé dans la vallée de Munster.
Le plat dominical est emprunté à un chef du même territoire. Une sauce champignons - curry. Je dois rectifier trois fois.
Beaucoup sont dans la peine et l'isolement. Heureusement, depuis sa maison, Patrick Wolfer assure le show en live sur Facebook l'après-midi. Ce dimanche, il fait hivernal. Ambiance après-ski. 
M6 consacre un reportage à la ville d'Altkirch. Mes confrères ont fait un reportage proche du mien en suivant la police municipale, désormais masquée. Ma ville a une unité Covid-19 d'une cinquantaine de lits.

Lundi 30 mars  14e jour 

Je suis officiellement en vacances.
Déconnexion temporaire de l'actualité Covid-19. Un grand chantier m'attend. Remettre en état le réseau de train miniature abandonné là-haut aux araignées et à la poussière. Comme si la guerre était passée par là.


30 mars 2020

PROMESSES EXTRAORDINAIRES










Depuis que la France et beaucoup d'autres pays sont à l'arrêt, le téléphone ne sonne quasiment plus. Avant, pas un jour qu'on ne m'appelle pour me vendre un fournisseur d'énergie, une assurance, une rénovation. Après deux semaines de confinement, nous devons nous contenter de ce que nous avons et de ce que nous pouvons encore trouver dans le commerce autorisé si nous ne passons pas par la vente en ligne. Le Covid-19 va chambouler le monde et la mondialisation. Et nos modes de consommation sûrement.

L'automne dernier, Annie Pastor publiait chez Hugo Desinge
« Merveilles vendues par correspondance » dans la série « Les Pubs que vous ne verrez plus jamais », plus de 100.000 exemplaires vendus pour chacun des 4 volumes.
En 160 pages, l'ancienne rédactrice en chef adjointe de L'Echo des Savanes nous raconte « l'art et la manière de vendre n'importe quoi à n'importe qui ». Une compilation d'annonces publicitaires invraisemblables puisées dans la presse populaire des Trente Glorieuses. L'auteure pose le contexte. La Guerre Froide. Les Etats-Unis exportent leurs produits et leur culture de consommation de masse. C'est le culte d'une société dominante, prospère, idéale et moderne, à l'inverse du bloc communiste. L'American Way of Life. « Acheter tout et n'importe quoi est possible et même un devoir moral pour la prospérité » d'un pays soumis au capitalisme triomphant. Annie Pastor s'intéresse ici à « un marché parallèle qui se développe rapidement, de produits miraculeux et étranges, de loisirs peu chers ». Ses opérateurs trouvent des espaces de communication plus accessibles dans les magazines spécialisés et la bande dessinée. Ils vont les inonder de publications sidérantes qui aujourd'hui nous feraient rire ou au contraire frissonner.
En 1941, les chewing-gums Bazooka proposent de gagner un Flexy Racer, la planche à roulettes sur laquelle on se couche. En 1968, sautillez chaussé de Space Shoes. Ou lancez-vous à plat ventre sur le Slip'n Slide, tapis à arroser pour glisser sur une dizaine de mètres. Des activités de plein air qui risquent de mal finir, soit par traumatisme, soit par brûlure. A l'intérieur, les enfants peuvent s'improviser chimistes. Une maison française vend une boîte de résines polyester qui mal mélangées avec les catalyseurs font encourir un départ de feu...
D'un très mauvais goût, inspirée de la Révolution française, Chamber of Horrors de Madame Tussaud, la réplique en plastique d'une guillotine avec une figurine bientôt décapitée. « Harmless fun ! » Avant la déferlante Halloween, une société new-yorkaise vantera ses X-ray glasses, lunettes à rayons X permettant de voir le squelette d'un vivant.



Dans ce monde d'après-guerre mondiale, il faut bien présenter, être beau, fort, cultivé, prospérer. De petites annonces promettent aux petits gabarits de grandir, de « 8 à 16 cm à tout âge ». Annie Pastor a trouvé une mine de publicités autour de la transformation physique, mincir en pétrissant avec le pétrisseur Sterling par exemple, se forger une gorge de rêve, paraître plus jeune chaque matin... Pour les hommes, changer de tête avec un postiche ou faire pousser les cheveux avec un appareil de massage infrasonique (sic). Le mâle doit rassurer. On lui prodigue le pouvoir secret du kung-fu chinois, mais la femme aussi peut se défendre en apprenant la méthode de Yubiwaza, mettre à terre son agresseur avec un seul doigt...
De nombreux domaines sont abordés dans ce recueil, de l'apprentissage des miracles dans sa vie à l'attirance de l'amour en passant par l'espionnage de son voisinage voire la sorcellerie avec le kit vaudou.
Le plus beau dans cette rétrospective richement illustrée, « c'est COMMENT on vous a vendu » ces merveilles. « La forme est encore plus forte que le fond, qui apparaît aujourd'hui aussi rétro que surréaliste, comme une forme d'art brut et primitif. » « Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute », écrivait Jean de La Fontaine.

L'Action Automobile et Touristique printemps 1954


Le monde a changé ces dernières décennies. Mais il se trouve toujours une annonce dans la presse pour améliorer notre condition ou promettre le retour d'un être cher.
Maintenant, tout n'est pas bidon. Ainsi « ces Tupperware qui vous changeaient la vie » en 1973 sont toujours dans l'air du temps. Et continuent de changer la vie, parfois confortablement. Contrairement aux figurines d'étain;  le coulage de soldats proposé aux enfants par Kaster dans les années 30 a fatalement eu du plomb dans l'aile.





Merveilles vendues par correspondance
par Annie Pastor, Ed. Hugo Desinge  

27 mars 2020

PARLONS ELSASSICH DKL DREYECKLAND vendredi 27 mars 2020





S'esch küm z'glàuiwa, s'esch scho weder Fritig. C'est à peine croyable, nous sommes de nouveau vendredi. Pour le million et demi de Français au chômage partiel, ça ne change pas grand-chose. Quoi qu'il en soit, le week-end arrive. S'Wuchanand zaigt si.
Et le week-end on fait quoi ? On passe de bons moments avec ceux qu'on aime, ses amis, ses proches. Bon, ça c'était avant. Car depuis le 17 mars, nous sommes confinés.
Jeder bi sech un Gott bi àlla, pourrait-on détourner de l'alsacien.
Or il y a toujours des apéros entre voisins, bien que ce soit formellement interdit. En Gironde, les gendarmes ont pris 9 personnes en train de trinquer sur le trottoir. 135 € la prune pour chacun. En Alsace, on préfère la prune dans le verre, a Pflümawàsser -mais avec modération. M'r wann kä Pflüma hà.
Mais ne soyez pas tristes, car dans le confinement on vit autrement. Et comme l'apéro collectif est proscrit, on a inventé l'apéro Skype, l'apéro par visioconférence, d'r Aperitif met Videoverbendung, on peut aussi dire Apatitàreger pour apéritif.
C'est ainsi que j'ai surpris mon fils confiné dans sa chambre mais visiblement bien entouré.
Il participait à un apéro Skype.

J'aimerais bien trinquer avec vous, mais vous êtes trop nombreux. Promis, le cœur y est,
s'war garn gschah.
Hopla, màchet's güat un bliewet gsund. Gsundheit !



26 mars 2020

PARLONS ELSASSICH DKL DREYECKLAND jeudi 26 mars 2020

Photo Thierry Kuba 




C'est le jour 10 du confinement. Depuis une semaine et demie, beaucoup d'entre nous travaillent à domicile. M'r schàffa d'Heim. S'heisst, m'r mian d'Heim schàffa.
Ça vaut aussi pour vos animateurs et journalistes.
Voyez, on peut faire une émission « Debout l'Alsace »en multiplexe, d'r einer esch do, d'r ànder hockt därt. Sauf Mister Music qui garde les murs. Un peu comme le père Fouras du Fort Boyard, salut Thierry !
Mais nous ne sommes pas tous égaux dans / devant le télétravail.
Après moins de deux semaines de confinement, Deskeo, premier opérateur de bureaux flexibles en France, a interrogé plus de 2700 professionnels au sujet de leurs conditions de télétravail forcé. Une enquête qui montre une situation très complexe.
Au moment de l'enquête, 29% des personnes interrogées déclaraient travailler sur leur lieu habituel. Fàscht a drittel im Altaagliga. Pour 71%, c'est le télétravail, essentiellement à domicile, d'Heim wia meer. Pour les autres, c'est dans une maison de campagne, im Làndhüss oder im Wäkendhisla. Pour 1%, c'est ailleurs, peut-être chez la copine, allez savoir.
En tous cas, la plupart des télétravailleurs découvrent cette nouvelle façon de faire, à 70%.
Et surtout, 3 personnes sur 4 déclarent ne pas avoir une pièce pour télétravailler.
Voyez bien, pour « Debout l'Alsace ».
Chez moi, c'est au salon, s'esch heimlig. Chez Maryline, c'est peut-être à la cuisine comme elle mange toujours notre Miss Rillettes, chez Pierrot Maurer c'est à la cave, d'r Pierre gaitscht im Kaller.
L'essentiel, c'est d'être efficace.

D'Heim schàffa, dàs dian mr scho schàffa. Ça va le faire.


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