26 février 2020

LA MAHLSUPPA EN ATTENDANT LA FASNACHT




Topinambours, panais, crosnes, rutabagas...Les légumes anciens reviennent avec leurs saveurs particulières. Je me suis dit que comme le vintage était moderne, pourquoi ne pas fouiller dans ma mémoire pour puiser une recette de grand-mère Maria...
Ça faisait longtemps que je n'avais pas eu de mahlsuppa, la soupe à la farine rôtie. Il est vrai que mamama s'en est allée il y a plus de trente ans, emportant avec elle ses plats inoubliables. Mais nous avons tous eu ou avons encore une mamie cuisinant comme un chef.

La mahlsuppa de mon aïeule était couleur marron. Ce soir, après une longue préparation mentale, je me suis décidé à en faire une à mon tour, la première de ma vie culinaire. Elle ouvrira une longue série j'espère, tant les variantes sont nombreuses.
Carnaval approchant à grands pas, je me suis intéressé à la version bâloise. Car la Basler Mählsuppe se sert pendant la Fasnacht, les trois plus beaux jours des Bâlois, bien qu'elle se consomme toute l'année. Pourtant, si les Romains la préparaient déjà, on disait jadis que la soupe de farine était un plat de pauvre. Qu'importe. Il ne tient qu'à nous de l'enrichir d'un légume, d'une herbe, d'une épice. Personnellement, j'ai ajouté un peu de muscade ce soir. Mais je n'ai pas forcé sur la cuisson de la farine, pour ne pas la brûler, ce que les puristes me reprocheront peut-être. Ah, autrefois, on disait aussi qu'une fille était prête au mariage si elle savait réaliser une Mählsuppe... On passe en cuisine ?




Pour régaler quatre convives, il vous faut :

5 cuillères à soupe de farine (blé,seigle ou maïs)
60 g de beurre
1 oignon
1 litre de bouillon de viande
sel, poivre
Une cuillère de vin rouge
100 g de gruyère râpé

Progression
Dans une casserole, faire brunir la farine, couleur noisette.
Ajouter le beurre et l'oignon émincé, faire revenir.

Mouiller au bouillon froid, porter à ébullition, laisser mijoter une vingtaine de minutes.
Rectifier.
Verser le vin et mélanger.
Avant de servir, parsemer la soupe de gruyère.


Et, en période de carnaval, décorer la table de serpentins.





                                                                                DR

25 février 2020

PARIS DÉCONNECTE FESSENHEIM




22 février 2020


Je me revois adolescent dans la voiture de papa, quand nous rentrions de Balgau, le berceau familial, la nuit venue. Sur notre gauche, la silhouette de la centrale nucléaire de Fessenheim. L'éclairage de nuit, les lumignons rouges...

40 années ont passé. Je fais ce matin le chemin inverse, sous un ciel lumineux. La D468 fend les champs et me fait traverser des villages qui me semblent figés depuis des décennies. La paix de la plaine du Rhin.


Il fallait s'accréditer pour participer à la conférence de presse des élus du Pays Rhin – Brisach à La Ruche, l'outil économique au service des entreprises. Il n'y a pourtant pas de ministre en vue. La presse est nombreuse malgré l'heure matinale, un samedi. Les grandes maisons de l'audiovisuel sont au rendez-vous. Fessenheim est un sujet national. Jean-Luc Cardoso, délégué CGT Mines – Energie, plus de 30 ans de centrale, expose à mi-voix les derniers instants du réacteur 1. Depuis quelques heures, celui-ci s'est définitivement tu. Une quinzaine d'agents et le syndicaliste ont assisté au découplage irréversible. Vers 8H30, une quarantaine d'élus locaux se figent derrière Claude Brender, maire de Fessenheim, et Gérard Hug, président de la Com Com. La plupart portent un bonnet rouge, clin d’œil aux Bretons, sauf que cette protestation colorée me paraît tardive. Maires, adjoints et conseillers ont voulu par ce geste « se réapproprier le symbole d'une lutte citoyenne qui a su ailleurs faire reculer un gouvernement ». Le 20 janvier dernier, ces mêmes élus avaient adressé une lettre ouverte au président de la République. Pendant plus de deux ans, ils ont « écouté patiemment les discours et les promesses tout en s'impliquant fortement au quotidien dans la démarche collaborative de reconversion du territoire ». Mais maintenant que Fessenheim 1 est inerte, les collectivités locales sont dans l'inconnu. La grande inquiétude est financière avec le FNGIR, fonds national de garantie individuel de ressources.
Avec ses deux unités de production, la centrale assurait l'an dernier 6,4 M€ de recettes fiscales au territoire, mais il fallait en reverser près de 3 à l'Etat par le biais de ce fonds. Or même si le CNPE ne verse plus son dû demain puisque réduit au silence, le territoire devra continuer de payer. Pour les dix ans à venir, l'Etat consent une compensation dégressive qui anéantira les recettes locales dans quelques années, sauf si Paris décide de neutraliser le FNGIR de Fessenheim, comme cela avait été annoncé il y a deux ans lors de l'installation du comité de pilotage par le secrétaire d'Etat Sébastien Lecornu. Dans cette perspective, la centrale pourrait coûter plus cher à son environnement que ce qu'elle lui aura donné en 40 années d'exploitation, craint Gérard Hug.



Après ce nouveau cri d'alarme, les bonnets rouges rhénans se mettent en marche en direction de la centrale, sous la vigilance des gendarmes. Ils parcourent quelques centaines de mètres pour dérouler une banderole décernant le «  César de la promesse non tenue au gouvernement Macron » devant le CNPE. Tout au long de la journée les prises de parole se succéderont autour de Fessenheim. A Colmar, les associations antinucléaires présentent trois bouteilles de champagne bio. La première sera débouchée le 30 juin, à l' arrêt de Fessenheim 2. Certains ne verront pas couler le breuvage de la deuxième, prévue pour l'achèvement du démantèlement du site, dans une vingtaine d'années au moins. Le dernier flacon ne sera jamais ouvert. La radioactivité du site ne disparaîtra pas avant une éternité.



17 février 2020

LES HISTOIRES DE MAMOUR FINISSENT MAL



❤❤❤❤

Photo Cie KALISTO


THÉÂTRE IMMERSIF.  Tandis que "Strasbourg mon amour" vit ses dernières heures, c'est à Mulhouse qu'on retrouve cette fin de semaine la Compagnie Kalisto dans une coquine proposition culturelle.
La version mulhousienne d'Hôtel Mamour. Un "établissement" éphémère qui a pour locaux Le Séchoir, lieu artistique du côté de la gare du Nord.




La troupe à géométrie variable de Kalisto avait créé cette animation l'an dernier et trouvé son public à Motoco. Cette année, à l'occasion de la fête des amoureux de Strasbourg, elle vient d'investir l'hôtel alternatif Graffalgar pour son Mamour. De vraies chambres, toutes décorées par la création contemporaine. Au Séchoir, où je n'ai pas mis les pieds depuis une éternité, autre dimension. Grands espaces, passé industriel, métissage d'activités économiques et lieu d'exposition. Il était recommandé de réserver, la jauge étant de 40 visiteurs par créneau de deux heures. Et de venir dix minutes avant le rendez-vous. 


Photo Cie KALISTO


14H50. Me voilà donc face au grand escalier. Je fais partie des premiers "clients" et me retrouve dans une salle d'attente dont les murs sont habillés de dessins érotiques. Je comprendrai plus tard qu'il s'agit de la nouvelle exposition Osez!  Une femme en robe blanche assure l'accueil. Mme Klauddy, la tenancière de cet hôtel de jeu. Un type à lunettes teintées semble être le DJ dans son accoutrement de salle de bain. Au milieu de ce hall, une table, des chaises et des bouquins à ne pas mettre entre toutes les mains. 
Je suis détenteur d'un passeport qui me donne accès à tout.
Il a une durée de deux heures. Il faut le garder en main et le présenter sans cesse. Ce sésame vaut priorité. Sans délai, on me fait entrer chambre 1. Une jolie blonde en peignoir mais d'humeur explosive  m'indique le lit. Cinq minutes plus tard, elle me poussera vers la sortie en vitupérant.

Impossible de rectifier le cours des choses. En fréquentant l'Hôtel Mamour, nous passons d'une chambre à l'autre, de 1 à 10. J'ai opté pour le rôle de "client", ce qui me permet de partager activement la séquence avec le/la comédien/ne. Si j'avais été "voyeur", on m'aurait mis un loup et j'aurais assisté aux scènes sans broncher. Les chambres sont aménagées dans les espaces de création du Séchoir. Un lit, un rideau, des accessoires. Une caméra pour permettre au public du hall de mater à son tour sur un mur d'images. Les occupants de cet hôtel imaginaire sont époustouflants. Ils sont criants de vérité, dans leur personnage tourmenté ou loufoque. Je ne sais pas pourquoi il me faut chaque fois décliner prénom, âge et provenance, mais cet huis clos est intense et je m'imprègne de l'atmosphère sans attendre, entrant à mon tour dans un personnage que je construis sur-le-champ. Evidemment, mon hôte/sse a la maîtrise de son texte et quoi que je réponde, il / elle ne déviera pas de son implacable trajet. A la fin du temps imparti, une sonnerie retentit. Il faut conclure. Entendre l'issue, forcément inattendue. Et sortir, comme on s'extrait d'une cellule de Fort Boyard. Les locataires de Mamour semblent nous connaître. Il est vrai qu'un questionnaire improbable nous était suggéré à l'inscription. Ni le temps de s'attacher à ces filles qui n'ont pas froid aux yeux, ni le loisir de poursuivre la conversation avec ces hommes qui vous avouent leur flamme en remuant des souvenirs de gare ou perdus dans leur lyrisme. La dernière visite est ubuesque. Chez une fille en combinaison de plongée hyper maniaque de l'hygiène corporelle... 

Photo Cie KALISTO


Aucun temps mort dans cette pérégrination hôtelière, surtout que mon passeport m'ouvre encore à deux activités particulières et collectives. Un cours de fitness préparatoire à du sport en chambre avec une coach qui se dépensera plus que ses élèves. Et une séance de massages inspirés de la culture chinoise...


Deux heures ont passé. Dix arrêts en chambre, en tête-à-tête avec ces étranges personnages. Dix histoires courtes, dix destins. Mais sans lendemain. Le visiteur n'aura fait que passer dans leur vie. C'est peut-être cela que Mamour rappelle. Dans un hôtel de passe, le présent est déjà le passé.
Mais on se dit qu'on y reviendra traîner ses guêtres, sous l’œil complice de la mère Klauddy.  



Photo Cie KALISTO

#compagniekalisto
#hotelmamour

11 février 2020

CAMPING - CAR MULHOUSE : LE BON BLANC POUR PRENDRE LE LARGE




Tandis que la tempête Ciara glisse vers le sud-est, il reste quelques heures pour aller au « camping indoor » de Mulhouse. Pour la deuxième année, Jean-François Claudot organise Camping-car Mulhouse au parc des expos. Le directeur général de CLC Alsace (Benfeld) a créé un événement répondant à un besoin de la clientèle haut-rhinoise. Fort du succès de 2019, le spécialiste du véhicule de loisir a commandé 5.000 m2 cette année, pour mieux mettre en valeur les modèles. Ils sont plus de 220, en VN et VO. Les premiers sur la moquette, les seconds à l'extérieur.

Jean-François Claudot

Un salon plus aéré, des fourgons ouverts à la visite, les soutes béantes, de quoi donner envie de prendre la route et s'ouvrir à de nouveaux horizons... Celui qui ne connaît pas ce type de manifestation ne sait pas. Le camping-car n'est pas un véhicule de retraités. La plupart des acquéreurs sont actifs, explique Jean-François. Et une écrasante majorité est primo-accédante. Si la durée moyenne de conservation du véhicule est d'environ vingt ans, l'investissement est durable, surtout que l'utilisateur n'avale pas les kilomètres. 



Dans l'exposition mulhousienne, il y en a pour tous les budgets. Dans le neuf, on peut entrer en gamme avec Carado pour 40.000 €. Les marques françaises sont nombreuses d'ailleurs dans un marché qui a retrouvé ses couleurs d'avant la crise de 2008, avec quelque 25.000 immatriculations, quand son homologue allemand en est quasiment au double. Les accessoiristes sont aussi présents, outre un aménageur, les associations de camping-caristes et les indispensables financeurs. 



Au dernier jour de cette présentation statique quelques couples considèrent les salons roulants. On passerait quatre heures sur la manifestation, de quoi faire et affiner son choix. Entre le classique, le vintage, le tout-terrain et même le transporteur de voiture...







3 février 2020

ZILLISHEIM : DES FOLS A LA MESSE




Dimanche 02 février. L'Eglise célèbre la présentation de Jésus au Temple de Jérusalem.
C'est le dimanche de carnaval à Zillisheim, sous un ciel pluvieux. Il va être 9 heures, des gens costumés montent les marches de St-Laurent, la « cathédrale » du village au lycée-collège épiscopal. L'opportunité m'est offerte de découvrir enfin cette église construite par Jean-Baptiste Schacre, l'architecte qui a laissé trace aussi à Mulhouse. N'étant pas de la commune, je prends place au fond, tandis que l'entrée centrale est bordée par une haie de musiciens de Rhinau Schalmeien Alsace.



L'abbé Régis Alina, curé de la communauté de paroisses des portes de l'Altenberg, procède aux derniers ajustements. Il s'apprête à une expérience inédite, la messe des fols.
Sur l'initiative des Schnackaschlacker Wàgges, les carnavaliers de Zillisheim, le chargé d'âmes a accepté, en accord avec le conseil de fabrique, de célébrer un office du temps de carnaval. Précisément avec les Guggamusik. Après tout, les gendarmes, les pompiers, les anciens combattants et d'autres ont aussi leurs messes. Certains esprits conservateurs ont pu s'offusquer de voir des costumes et des instruments dissonants avec la maison de Dieu. Mais il n'y aura pas eu de fausse note avec les formations cacophoniques, le déroulé étant réglé comme du papier à musique. L'abbé Régis a cru bon de rappeler le caractère sacré des lieux. Pas de masques, pas de confetti, pas de liesse et des applaudissements contenus jusqu'à la fin du culte.



Outre-Rhin, les messes pour les carnavaliers sont courantes. L'Alsace vient de s'y mettre aussi. C'est d'ailleurs légitime, notre carnaval étant rhénan. Compte tenu du temps liturgique, l'abbé bénit les cierges, tandis que près du chœur étincelle encore la crèche de la Nativité. Nos ancêtres la gardaient effectivement jusqu'au 02 février.
Cinq groupes musicaux étaient annoncés pour cette messe forcément médiatique, formant une cohorte d'une centaine d'éléments. On apprécie la discipline de ces groupes qui ont dû trouver de la place pour leurs attelages à percussions. Rien à voir avec les jours de profession de foi où la foule entre dans l'église comme un troupeau de moutons. Mais on va surtout vibrer avec les morceaux adaptés aux vieilles pierres et à l'événement. Les Gugga ne sont peut-être pas des enfants de chœur, pourtant elles comptent des enfants de Dieu. Ce jour, catholiques et protestants voire athées sont réunis dans la communion. 

Patrick Keller, Schnackaschlacker Wàgges

Un office bilingue franco-allemand pour les amis de la bande rhénane et de vibrantes interprétations comme l'Hallelujah des Rhy Pirate de Bâle. Depuis la tribune, l'orgue et la chorale complètent l'habillage musical. Sur place aussi, les Dry Ratzer d'Attenschwiller et les Monster Waggis de Hombourg. Une sainte messe coupée par une percutante homélie au cours de laquelle l'abbé Régis rappellera que le carnaval est lié à la religion. L'heure est à l'expression de joie mais les carnavaliers doivent se souvenir qu'après vient le temps de Carême.

En attendant, j'aurais vécu une heure et demie d'émotions. Je suis convaincu que cette messe-là a touché le cœur de l’Éternel. L'après-midi, la cavalcade se déroulera sous un ciel apaisé.





Unser Maire esch a Wàgges !
Joseph Goester, maire de Zillisheim