2 mars 2021

EUROGLAS HOMBOURG : LE VERRE COULE A FLOAT

20 km au sud de Fessenheim. Hombourg, toujours au bord du Rhin. C’est ce village que la famille Trösch avait choisi pour produire dès 1995 son propre verre flotté et « briser l’oligopole européen ». Ainsi naquit la première des quatre unités Euroglas de l’entreprise fondée à Bützberg en Suisse et désormais centenaire. 25 ans plus tard, le site alsacien s’apprête à grandir.




Ce 1er mars, Jean Rottner emmène une petite délégation de la Région Grand Est à Euroglas. L’élue du territoire Martine Laemlin-Delmotte en fait partie. Thierry Engasser, maire de la commune d’accueil est là aussi, qui connaît bien l’usine et l’accompagne dans son développement. Christophe Brossay assure la visite. Directeur depuis une décennie, il est sur place depuis la première heure. L’usine emploie 152 personnes, mais elle semble tourner quasiment seule, car très automatisée. Certains jours ils ne sont qu’une dizaine dans ce paquebot dont la moitié de l’effectif travaille en 5x8. La visite s’effectue au pas ministériel, les photographes sont priés de ne pas capturer le process. Plus on avance dans cette longue ligne droite, plus le thermomètre grimpe. Le four est un enfer, conçu pour ronronner sans cesse. Reconstruit en 2008, il va bientôt être remplacé, l’espérance de vie d’une telle installation étant de 15 ans. Le monstre consomme 4.000 m³ de gaz à l’heure, une énergie brûlée avec de l’air réchauffé, de quoi faire des économies. Plusieurs régénérateurs l’escortent, plongeant à -8 m sous terre. A proximité, nous croisons deux ouvriers portant des masques inquiétants. Ils sont maçons fumistes, les gardiens du magma. « Le métier le plus dur » commente le directeur. Au cœur du four, la température est d’environ 1500°. Pour faire baisser celle de la fusion, on injecte du calcin, c’est-à-dire des débris de verre du site, des clients et des recycleurs. Le monstre rend journellement 500 tonnes de verre plat à 1200°. On parle de verre flotté puisqu’il glisse sur un bain d’étain et forme un ruban continu. Il sera refroidi très lentement dans un long tunnel. Dans la partie froide de l’usine, la découpe. Elle respecte le standard européen, soit 3,21 m par 6. On apprendra aussi que de la poudre est déposée entre deux plaques de verre, indispensable à leur séparation.

Dans la salle de contrôle, les opérateurs ont les yeux rivés sur les écrans. Les caméras restituent le souffle du gaz enflammé. Le travail est fait de beaucoup de surveillance, explique le directeur. Les lourdes plaques de verre sont chargées sur des remorques sans fond. Plusieurs dizaines de camions sont en rotation chaque semaine, mais l’impact environnemental va baisser avec l’intégration d’une partie de l’activité de Burnhaupt. Euroglas doit accueillir 80 des 120 salariés de Glas Trösch, qui sera maintenu.

Quant au site de Hombourg, il travaille depuis deux ans à son extension. A la mi-2023, il devrait tourner avec sa ligne de transport et son troisième four. Les travaux devraient commencer cette année pour livrer un nouveau bâtiment de plus de 40.000 m².

Ici, tout est colossal, même les investissements, que la direction ne communiquera pas. Les actionnaires sont suisses, ce n’est pas dans leurs habitudes de divulguer les chiffres. En 2008, le four avait coûté 50 millions.

Enfin, Hombourg ayant intégré M2A, son usine verrière pourrait être raccordée demain au réseau de chaleur de l'agglomération. 


17 février 2021

FRINA WITTENHEIM : DU FIL MOUSSE A RETORDRE

 


La Tunisie a connu la Révolution du Jasmin. A Wittenheim, rue du Jasmin, les salariés de Frina Mousse France sont en lutte aussi, avec dignité. Pour sauver leur entreprise.


Frina Mousse occupe un bâtiment de 11.000 m2 à l'entrée de la commune. Elle a débuté son activité en 1963 à Village-Neuf. Dix ans plus tard, elle s'installait dans la commune du Bassin potassique. Mais l'entreprise ne fêtera peut-être pas ses 60 ans. 
Car le 25 janvier, le gérant suisse, dont la présence serait rare sur le site, a fait une apparition pour annoncer la mauvaise nouvelle. Fermeture de l'unité et suppression des 20 postes. 

L'entreprise de Wittenheim est spécialisée dans l'éponge mais s'est diversifiée dans la transformation de la mousse dans divers domaines comme l'acoustique, la filtration de l'air et de l'eau, l'étanchéité. Elle s'est imposée sur le marché des mousses polyuréthane avec des donneurs d'ordre comme Mahle, Electrolux, Fondis et le carnet de commandes est plein. Cela n'empêche pas de l'avoir laissée sur le carreau lors du rachat de son groupe Foampartner par le Belge Recticel. Le premier a été cédé par la holding Conzzeta pour 270 MCHF environ. C'est lui que le personnel local met en cause, qui n'a pas réalisé d'investissements, recherché de nouveaux clients, voire un repreneur. Surtout, c'est la méthode qui a assommé les salariés. Une communication par voie électronique et des propositions "minimalistes" quand la plupart des collaborateurs ont plus de 15 ans d'ancienneté. Outre bien sûr le dirigeant peu visible. 


                                        

                                                            Photo Ville de Wittenheim 


Ce 16 février, le personnel a haussé le ton, après la visite d'Antoine Homé et de son adjointe à l'économie Anne-Catherine Lutolf-Camorali, qui ont rejoint les syndicalistes de la CGT du Bassin potassique. Chez Frina Mousse, il n'y a pas de syndicat, mais la CGT soutient le juste combat. Se battre est dans les gènes du pays minier, commente le maire, car ici on est tous issus du monde ouvrier. Antoine Homé raconte "être tombé de son caddie" en faisant les courses, lorsqu'il a eu vent de ce qu'il se tramait rue du Jasmin. Dès lors, l'élu M2A a convoqué le gérant en mairie et activé les réseaux, de la communauté d'agglomération à la Région en passant par la CeA et la DIRECCTE. "C'est inadmissible sur le plan humain comme sur le plan industriel" gronde le maire, soucieux de rétablir le dialogue et de  trouver une solution permettant la sauvegarde de l'outil, du savoir-faire et des emplois. Pas question de laisser mourir une PMI par diktat du capitalisme financier. 



A l'issue de cette rencontre avec les élus locaux et la CGT, les salariés de Frina Mousse  ont symboliquement cadenassé l'entrée de leur usine. Plus personne ne rentre. Eux continueront de produire, sans bruit, consciencieusement, ils ont de quoi tenir et constituer "un butin de guerre", jusqu'à l'ouverture de négociations. Dehors, trois pendus en mousse balancent aux mâts, tandis que des t-shirts gris sont accrochés aux murs, portant les prénoms de ceux qui ont fait la richesse de Frina sans se faire mousser. 




15 février 2021

UN SCHANKALA CHEZ JEANNETTE

 

#boulangeriewidemann



Mulhouse ne verra pas encore son carnaval cet hiver. Pourtant, rue du Manège, dans le vieux quartier Fonderie, masques, chapeaux et confetti colorent la vitrine de la boulangerie artisanale. Elle devait être animée naguère, cette Gràstigàs, comme en témoignent les commerces éteints, dont la proche boucherie-charcuterie et à peine plus loin la boulangerie Scherrer. Depuis 1923, heureusement, la maison Wittmann-Brand étincelle au bout de la rue, côté ancienne cathédrale SACM. En poussant la porte du 35, je me retrouve chez un boulanger traditionnel. A l’accueil dynamique, la charmante lodie que l’on croit connaître depuis longtemps. J’ai rendez-vous avec la patronne, qui quitte momentanément le fournil pour me chercher. Elle m’y présente Roland, son chef boulanger, à la confection de baguettes. Sans lui, l’établissement n’existerait peut-être plus. Le gaillard totalise 46 années de pratique mais se sent comme un quadra. Pas de retraite en vue pour ce forçat de la farine au travail depuis hier soir. Justement, son aide est en arrêt, il faut donc mettre les bouchées doubles. Mais Jeannette met la main à la pâte aussi.




C’est la fille du fondateur, Jean-Louis Widemann, qui perpétue avec Roland un savoir-faire et une signature familiaux. Jeannette est venue sur le tard à la fabrication du pain. Elle était d’abord vendeuse.
Le temps du carnaval donc, sans la liesse, mais avec les spécialités boulangères. Scharwa, schankala, fàsanàchtskiechla. Les beignets sont fourrés à la framboise, au Nutella°, à la crème pâtissière, à l’abricot, à la pomme. Chacun y trouvera son goût. Je suis étonné par la taille des cuisses de dames, mais le schankala à la noisette peut se consommer le lendemain, ou se partager. Je n’ai pas eu le temps de le goûter, ma stagiaire l’a fait disparaître… Les petits pains sont de bonne taille aussi. C’est qu’il est généreux Roland.





En vitrine sont accrochés par ailleurs des moules. Le kougelhopf est une spécialité de la maison. Jeannette s’occupe davantage de la restauration à emporter ou à livrer. Mais avec la crise sanitaire, le proche campus Fonderie s’est vidé et le télétravail a fait le vide. Heureusement, la clientèle habituelle est au rendez-vous, qui n’est pas exclusive au quartier.

Après les gourmandises de carnaval, Jeannette et ses boulangers prépareront les gâteaux de Pâques. Avec une vitrine réactualisée.





5 février 2021

NOTRE DERNIER BAL

 










C’est un samedi soir de l’hiver. Nous avons dîné rapidement pour aller au bal. Dans le Sundgau, les Fêtes passées, le carnaval prend le relais. Jusqu’à une période récente, je ne ratais pas le bal de Carspach sous le chapiteau dressé sur la place à l’entrée de la commune. Bal des veuves le vendredi, bal carnavalesque le samedi. J’y avais rencontré la dame à la trottinette. C’est aussi Riespach, sous chapiteau encore, où Rino et sa chanteuse avaient assuré une ambiance comme un orchestre. Et ce soir, je t’emmène à Jettingen mon amour. Combien de fois suis-je venu dans l’espérance de t’y faire tourner un jour ? Une douzaine de kilomètres séparent le village d’Altkirch, mais quand nous approchons de la salle des fêtes, la route est bordée de voitures et le parking complet.
Qu’importe. Nous sommes venus guincher. Il ne fait pas froid. Heureusement, car il faut faire la queue devant la structure temporaire d’où s’échappe la musique. Il va être 21 heures. Le public est essentiellement jeune, des adolescents, de jeunes gens, des amis, des couples. Certains sont costumés. La caisse est tenue par les sapeurs-pompiers, organisateurs du carnaval de Jettingen. Certains visages me sont familiers. Rouflaquettes, cheveux blancs, air bonhomme… On est entre de bonnes mains ici. La sécurité est assurée par un prestataire. Quand nous entrons dans la salle, les tables sont occupées. Il nous faut aller au fond, derrière les musiciens, pour tenter de nous poser.





Energy a déjà chauffé le plancher. Tu vas prendre une coupe de crémant. Je reste à l’eau comme beaucoup de seniors.
Si d’aventure il fallait se dépenser sur des rythmes dingues. Je te contemple. Tu es belle. Je remarque un vieux couple emporté par la valse lente. Bientôt le répertoire va rajeunir. Je ne sais pas danser. Du reste, ce n’est pas ma raison d’être là. J’aime juste cette atmosphère incomparable du bal sous chapiteau, comme nos parents ont pu la connaître. A Jettingen, l’installation est moderne mais habillée. Le parquet souffre mais ne rompt pas.




Les lustres s’éteignent, la série de slows commence. Je t’invite et nous nous enfonçons dans la marée parmi les amoureux, les danseurs de bal et les fêtards. A cet instant, il n’est plus que toi et moi sous les lumières tamisées, mon visage dans tes cheveux. Un éclair de félicité. Je te serre contre moi, toi que j’attendais depuis toutes ces années.

Bientôt la piste sera trop petite pour la foule enivrée par les refrains attendus. L’heure a tourné. Nous nous éclipsons comme nous sommes venus.
C’était notre dernier bal de carnaval.




28 janvier 2021

LES DENTELLIERS DU TEMPLE ST-ETIENNE

 







Dans deux ans, Mulhouse célébrera le cinq centième anniversaire de son rattachement à la Réforme. D’ici à là, le temple St-Etienne au cœur de la ville aura bénéficié d’une longue cure de jouvence. Depuis la pose de la première pierre en 1859 à ce jour, la cathédrale protestante qui dresse sa pointe à près de cent mètres du sol est un chantier perpétuel. En septembre 2019 commençait la restauration de la tourelle sud-ouest, mise en sommeil par le marché de Noël puis le confinement. On en voit le bout avec le remontage actuellement de sa flèche. Début janvier, une imposante grue avait été positionnée devant l’édifice pour hisser des pièces de plusieurs quintaux. La phase la plus spectaculaire des travaux, commentée par Xavier Boulivan, responsable d’unité au service architecture de la Ville.






La flèche du plus haut temple protestant de France avait été démontée entièrement, nombre de ses pierres étant en mauvais état. En septembre dernier, on avait assisté à la pose du socle. En janvier, c’est la partie intermédiaire. Puis le fleuron pour la sortie de l’hiver. Pour nous rendre compte des travaux, nous pouvons monter les quelque 140 marches de l’échafaudage habillé d’un trompe-l’œil. Le temps et les intempéries ont abîmé la structure. Il faut remplacer certains éléments à l’identique. Le travail est confié à l’atelier strasbourgeois de Léon Noël, tandis que le tailleur sur pierre s’occupe des petites pièces sur place, pour le compte de la société troyenne Socra, habilitée monuments historiques. Depuis près de 30 ans, l’édifice de Jean-Baptiste Schacre est inscrit à l’inventaire supplémentaire des MH. Les pigeons aussi ont leur part dans la dégradation. Mais ils risquent gros s’ils croisent les locataires de la tour nord : un couple de faucons pèlerins. Le nichoir des rapaces est remplacé lui aussi. L’architecte municipal explique que les éléments tiennent par l’effet de la gravité, comme un jeu de Kapla° mais une ceinture assure le maintien. Au besoin, un peu de résine pour les fissures, voire des agrafes. Les gargouilles n’ont pas échappé aux rides. Elles ne sont pas oubliées. Pour évacuer l’eau stagnante, les ouvriers ont creusé enfin des glacis. La tourelle se reconstitue peu à peu avec des blocs extraits d’une carrière bas-rhinoise. Les stries tracées dans le grès des Vosges jouent avec la lumière et les volumes. Depuis notre plate-forme, nous considérons la place de la Réunion dans l’humidité hivernale. Et le travail d’orfèvre au plus près des pierres soigneusement ajustées. Les techniques ancestrales se conjuguent avec la technologie actuelle. Il manque encore à ce stade une douzaine de mètres pour restituer la tour. Cependant que l’intérieur du temple est en transformation aussi.

Demain, le cœur historique de Mulhouse aura une scène nouvelle.
















21 janvier 2021

LES MAGES DE L'ECOMUSEE D'ALSACE fiction de Noël






Ils étaient sur la route depuis des heures. Ils étaient éreintés. Ils n’étaient pas attendus.

Youssef décida de faire une pause et quitta la RD 430 pour s’engager dans une petite route, pour ne pas attirer l’attention, à l’écart de la circulation, peu importante cette fin d’après-midi. Il pleuvait et la pluie rendait le voyage pénible. A cette heure-ci, il faisait quasiment nuit. Mariam ne quittait pas des yeux l’enfant aux yeux clos.
Au bout d’un quart d’heure, Youssef, qui s’était dégourdi les jambes, se remit au volant.
La vieille voiture ne démarra pas. Malgré la panique qui s’empara de sa jeune épouse, il tenta de rester calme. Les minutes passaient. Il ne comprenait pas. Il pleuvait sur la petite forêt dévêtue par l’automne. Par surcroît, le seul mobile du couple était désormais déchargé. Se mettre au bord de la départementale et appeler au secours.
Mais c’était laisser Mariam et le bébé seuls quelques dizaines de mètres plus loin, sans avoir un œil sur l’auto. Impensable. Les années ont passé, mais Youssef et Mariam ont toujours peur. Aucun automobiliste ne s’arrêterait sans doute en voyant un individu isolé s’agiter dans l’obscurité… Youssef se ravisa et tenta. Une voiture, puis une deuxième, une troisième. Toutes passèrent leur chemin, un long coup de klaxon en prime pour la dernière. L’homme retourna à sa berline épuisée. L’enfant dormait, la maman avait froid. Ils n’allaient tout de même pas passer la nuit ici. Youssef ne connaissait pas la région, mais avait vu le panneau annonçant « Écomusée d’Alsace ». Il prit son épouse et l’enfant ainsi que leurs maigres bagages et s’enfonça dans la nuit, trahi encore par la lampe qui dormait dans le vide-poches. Elle ne rendait plus de lumière. La pluie finissait de tomber.
Mariam tremblait de froid et de peur. Il fallait marcher. Youssef était convaincu de trouver une porte qui s’ouvrirait. Bientôt leur apparut un site clos. Ou presque. Un portail était entrouvert. La petite famille s’y engouffra. L’homme considéra les lieux. Un village fantôme, d’un autre temps. Pas la peine de toquer ici ou là. Il n’y avait manifestement personne dans les maisons. Soudain, des caquètements. En face, une ferme. Des animaux. Il y avait donc quelqu’un.Or, la partie habitée était dans le noir. Dans la dépendance, un âne et quelques moutons… L’horloge avait tourné, la faim grondait. On attendrait le jour pour repartir. On se contenterait du peu qu’il restait pour s’alimenter. Youssef n’envisageait pas d’entrer dans une maison, de toute façon glacée. Il n’avait pas de quoi allumer un feu non plus. La paille de l’étable et la proximité des ovins étaient un moindre mal. Ne voyant personne se manifester, le père décida d’appuyer sur l’interrupteur et éclaira l’étable.
Les réfugiés de l’Écomusée dormaient tant bien que mal quand des cloches commencèrent à chanter au loin. L’appel à la messe de minuit.
Entre-temps, le ciel s’était déchiré, laissant paraître quelques étoiles. D’autres encore, toujours plus nombreuses.
Youssef sursauta quand les oies se mirent à cacarder. Il serra sa femme très fort. Quelqu’un se tenait à l’entrée de la dépendance avec une lampe torche puissante. Dans son couffin, l’enfant gémit. Les moutons bêlaient. Le visiteur de la nuit bredouilla une interrogation en alsacien. Il était âgé et portait un bonnet. C’était Jeannot, un des agriculteurs chargés de l’entretien du cheptel de l’Écomusée. Il s’était souvenu qu’une entrée n’avait pas été verrouillée et pour échapper plus longuement au dîner familial, il s’était donné le temps d’une ronde d’inspection, ne sait-on jamais. Il s’était dit qu’il avait aussi oublié d’éteindre la lumière de la ferme de Sternenberg.
A la vue du jeune couple et de l’enfant pris comme des squatteurs, il ne trouva pas les mots. Les yeux embués, il se découvrit. Tremblant d’émotion, il prit son portable et appela un voisin pour organiser la prise en charge et le retour des infortunés inconnus.
Le temps de faire connaissance, trois autres individus se présentèrent à l’étable sundgauvienne. Ils portaient chacun une veste de la Croix-Rouge. C’était la maraude de Mulhouse emmenée par un retraité blond aux yeux rieurs, assisté d’un bénévole discret aux tempes grises et d’un autre d’origine africaine au large sourire. L’équipage s’était rendu dans les environs et avait appris la sortie imprévue de Jeannot. Un septuagénaire seul dans ce grand village abandonné n’est pas très prudent, alors on ne va pas lésiner sur un détour. Il restait au fond du véhicule du Samu social des couvertures de survie, des couches et de quoi faire des boissons chaudes. Le directeur de l’Écomusée fut prévenu qui trouva de quoi loger la petite famille pour le reste de la nuit. Voilà quelques années, Youssef et Mariam avaient vu leur maison taguée du n arabe à Mossoul. Ils étaient ces chrétiens d’Irak acculés à un triple choix : se convertir, mourir ou partir.
Sur la ferme de Sternenberg, une croix se dessine sur les tuiles.

22 décembre 2020
Ce récit est une fiction de Noël, y compris les personnages.

2 janvier 2021

PRENDRE UN TOUK-TOUK VERT A NEVERS

 



En septembre, il nous a été proposé de nous « ressourcer en Loire bourguignonne ». Un voyage de presse partagé avec six consœurs parisiennes et notre guide Maryline, qui débuta à Nevers. Cinquième ville de Bourgogne par sa population, un peu plus de 30.000 habitants, capitale de ce qu’on appelait le Nivernais jadis. C’est en gare que Maryline et moi, en provenance de Dijon, faisons la connaissance du groupe de Paris. Dans cette ville d’art et d’histoire, les bâtiments ferroviaires sont d’époque récente et rénovés. Mon attention est captée par ce qui fut l’Hôtel Moderne juste en face. 




Mais sur le parvis de la gare, l’animation est assurée par des tuk-tuk blancs. Un gaillard bonhomme à la barbe de Père Noël nous accueille : Fabrice Oger, un Bas-Rhinois établi dans la Nièvre. De sa voix douce, ce dynamique entrepreneur va m’expliquer rapidement comment les tricycles se sont imposés dans la cité de Louis de Gonzague-Nevers.

Fabrice a travaillé quatre années en Thaïlande. Lors de son séjour, il fut amené à emprunter souvent les tuk-tuk, ces véhicules appréciés des farang, plus nombreux et moins coûteux que les taxis. L’Alsacien en rentrant de Bangkok a décidé d’importer le concept en France. Dans la foulée de la COP21, il imagina un tricycle intégralement écologique. En famille, il travaille à VTB, Vélo Taxi Bikes, une SARL installée Avenue de Gaulle à Nevers. Fabrice en est le responsable commercial. 

Si le tuk-tuk du sud-est asiatique pétarade et pollue, le touk-touk nerversois n’émet ni bruit ni CO2.

C’est un vélo à assistance électrique. Souvent pointées du doigt, les batteries des nouveaux véhicules réputés verts. VTB mise sur les panneaux photovoltaïques pour recharger ses vélos-taxis.

Ainsi, ce seront les seuls véhicules du genre sans émission de gaz à effet de serre dans l’Hexagone. A la rentrée, Fabrice disposait d’une flotte de 8 tuk-tuk et d’une trentaine en pièces détachées. Il ambitionne de créer une unité de production dans le département bourguignon avec un objectif de 3000 exemplaires en 5 ans. Dans le pays nantais, c’est un projet de vélo de ville à guidon connecté qui est à l’étude. Car VTB loue aussi des cycles.





Notre prise en charge de la gare vers le Palais ducal ne dure que quelques minutes pour quelques centaines de mètres. Suffisant pour apprécier le service et échanger quelques mots avec le conducteur. L’assistance électrique est la bienvenue quand la rue monte, mais à l’approche plus tard de la Faïencerie Georges, elle sera à la peine sur un véhicule. VTB met ses touk-touk à la disposition des Neversois, coursier de proximité, vélos-taxis, mais aussi promeneur de personnes âgées, transporteur d’écoliers et bien sûr acteur du tourisme local, baladant les touristes entre cathédrale St-Cyr-et-Ste-Julitte et Musée de la Faïence. Toujours dans l’air du temps, les tricycles blancs participent à la redynamisation du centre-ville. Enfin, la large surface arrière de la carrosserie est un support publicitaire idéal sur un véhicule à l’image très positive. Fabrice Oger n’oublie pas de souligner la création d’emploi. Rien qu’à Nevers, la nouvelle activité pourrait générer une douzaine de postes selon l’entrepreneur.





VTB 46 Avenue du Général de Gaulle 58000 Nevers

Email : vtb.taxibikes@gmail.com


<script data-ad-client="ca-pub-3217579359405315" async src="https://pagead2.googlesyndication.com/pagead/js/adsbygoogle.js"></script>

Article épinglé

Nouveau à ALTKIRCH (68130)