13 octobre 2022

DES FLEURS A L'EPREUVE DU TEMPS





Aux Journées d'Octobre de Mulhouse, Folie'Flore crée chaque automne le spectacle autour des arbres, plantes et fleurs, mis en scène avec son, lumière et eau. Dans cette bulle du vivant on fait aussi de belles rencontres. Michel par exemple, un artisan de Rouen. Avec son épouse Helga, il gère Fleurs de Peaux°, une TPE spécialisée dans la création de bijoux en cuir. Repérée au marché de Noël de Kaysersberg, cette pépite a toute sa place au détour des jardins des JO.

C'est un petit cabanon, mais suffisamment grand pour y mettre en vitrine le savoir-faire du couple normand. Helga est dans le cuir depuis quarante ans. Michel était fleuriste. Les deux artisans ont conjugué leurs talents et passions pour produire une activité unique en France, croient-ils savoir, les fleurs de cuir. Michel est particulièrement fier de sa rose sur tige, qu'on peut offrir pour deux ans de mariage (noces de cuir). Pour les couples qui vont plus loin, le coquelicot scellera les 8 premières années de l'union officielle. Le pavot annuel symbolise le souvenir. Il est aussi fragile que le cuir de vachette est solide, à l'épreuve du temps. C'est la vedette du chalet, décliné en pendentif, collier, bracelet etc. Anémone, tournesol, fleur de lin inspirent aussi les créateurs rouennais. Et pour les JO, Fleurs de Peaux° a apporté des compositions pour s'inscrire dans le thème. Michel est étonné de la fréquentation nocturne de Folie'Flore, qui est un plus pour ses affaires. 
Fleurs de Peaux° est labellisée Eco-Défis. 

Après les JO, au marché de Noël de Kaysersberg à partir du 25 novembre.


12 octobre 2022

LES (COM)BATTANTES DE LA GRANDE GUERRE

 





TF1 nous a offert quatre lundis soir dans le cauchemar de la Première Guerre mondiale avec sa fiction « Les Combattantes », une coproduction avec Netflix à gros budget, 20 M€. C’était la création de la rentrée de la Une en 8 séquences de 52 minutes. Le dernier volet a réuni près de 6 M de téléspectateurs, contre moins de 5 en moyenne les 3 lundis précédents. Cécile Lome et Camille Treiner à l’écriture, Alexandre Laurent à la réalisation. Les auteurs ont voulu rendre hommage à ces femmes oubliées de l’Histoire, sans lesquelles la France n’aurait pu continuer quand les hommes étaient au front. La flamboyance de Marguerite (Audrey Fleurot), le sacerdoce de Sœur Agnès (Julie de Bona), l’abnégation de Suzanne (Camille Lou) et le bovarysme de Caroline (Sofia Essaïdi) en font des personnages attachants au destin bouleversé et meurtri par cette guerre qui produit des bouchers et anéantit les cœurs. Les scénaristes se sont investis du devoir de mémoire jusque dans les décors.
Ainsi les Vosges ont-elles accueilli une partie du tournage, elles qui avaient subi le front. On aura reconnu la commune de Senones rebaptisée « Saint-Paulin », nom fictif en référence sans doute à Saint-Paul, petit village du département. Et puis la manufacture royale de Bains-les-Bains, parfaite pour donner un environnement productif aux camions Dewitt, Plombières-les-Bains encore…Une aubaine pour le conseil départemental, qui a apporté son concours financier au titre de territoire de tournage.

Comment ne pas aimer ces 4 femmes si différentes, malmenées par cet univers d’hommes emportés dans la spirale du chaos.
Il n’est de guerre propre. D’ailleurs ici apparaissent les gaz de combat, peut-être en avance sur la chronologie de la Grande Guerre. Mais ce sont surtout ces hommes toxiques qui hanteront ces héroïnes d’un quotidien fait d’injustices, de larmes, de douleurs et de sang. Heureusement, l’officier chirurgien (Tom Leeb) fera oublier leur lâcheté, leur bassesse et leur perversité.


Le final de la mini-série aura cependant laissé beaucoup sur leur faim. Sœur Agnès (à mon sens bien jeune pour être supérieure) quittera-t-elle les ordres pour rejoindre le soldat (allemand) qui lui aura fait connaître l’amour ? Suzanne épousera-t-elle son médecin urgentiste ? Caroline Dewitt reprendra-t-elle les commandes de l’entreprise de son défunt mari ? Pour Marguerite, la prostituée devenue ambulancière, la vie s’est brutalement arrêtée dans la fange rougie par le sang des soldats.


7 octobre 2022

LE SOLEIL SE LEVE SUR LA MAISON HAAS - GILARDONI




Christian Fuchs devant le projet de réhabilitation 



Quelques jours auront suffi entre la décision du conseil municipal et l'entrée en action de la pelle. A Burbach en Alsace Bossue, le presbytère du XVIe siècle vient d'être rasé malgré les défenseurs du patrimoine. En Alsace, des centaines de bâtiments d'intérêt sont démolis chaque année et des permis délivrés sans concertation. Amer constat de Christian Fuchs, une voix qui compte dans la préservation du bâti ancien. Ce consultant, représentant de l'association Patrimoine en jeu, se souvient d'avoir été insistant voilà quelques années auprès de Nicolas Jander. Avec la future sénatrice Sabine Drexler et d'autres, il a réussi à renverser la décision du maire d'Altkirch de condamner la maison Haas (voir "Altkirch fait table rase de la maison Haas" d'août 2019 sur ce blog).  

La maison Haas-Gilardoni est cette maison très particulière en façade d'ogive au voisinage du camping Les Acacias et de l'étang de pêche sur les hauteurs d'Altkirch. Elle appartient à la mémoire collective locale, chaque Altkirchois d'un certain âge ayant une histoire, une anecdote à raconter. Nicolas Jander alors jeune maire avait pris un arrêté de démolition devant l'état de délabrement de la propriété abandonnée, la peur d'un accident en raison de la présence proche de collégiens et de lycéens, en l'absence de projet et le coût d'une réhabilitation. Des passionnés de vieilles pierres s'en sont émus. Christian Fuchs a surgi en mairie. Le conseiller municipal délégué Fabrice Robardey a été un acteur déterminant lui aussi, apportant sa connaissance. Grâce à ce revirement municipal, "c'est presque un miracle qui détonne dans ce monde", se félicite Christian Fuchs. Il cite en exemple ce "petit nombre de maires" osant dans un contexte qui a peu évolué. "L'affaire Gilardoni est un petit soleil".

Si une éclaircie s'est posée sur la zone de loisirs, c'est un projecteur qui éclaire aujourd'hui la capitale du Sundgau, car la Mission Bern s'est intéressée à la maison en déconstruction. Altkirch s'est placée parmi les 100 projets départementaux retenus cette année. Et le 9 septembre, dans la cour du musée, sous un chapiteau, Nicolas Jander a officiellement lancé la campagne de la "renaissance de la maison Gilardoni", en accueillant Véronique Keiff, déléguée régionale de la Fondation du Patrimoine. Où l'on a rouvert une page d'histoire glorieuse pour le territoire. La saga Gilardoni a débuté à Altkirch dans les années 1830. Les industriels ont créé une tuile révolutionnaire. Un siècle plus tard, la manufacture devait fermer. Il n'en reste que le bâtiment de l'ancienne bibliothèque et donc la demeure de gardien sur le site de la glaisière d'hier. Si l'annexe de la maison n'est pas retenue pour le sauvetage, elle sera remplacée par une halle couverte pour accueillir visiteurs et touristes. On imagine un lieu de convivialité de type guinguette. Mais la renaissance de l'ensemble a un coût. Près de 250.000 € pour le logement et autant pour la structure contigüe. La Mission Bern espère réunir 25.000 € dans la collecte Fondation du Patrimoine. Donner c'est réduire son impôt sur le revenu mais surtout 1 € donné est multiplié par 21 en retombées économiques. 

Nicolas Jander défend un projet voulu par les uns, décrié par les autres, dans un contexte où tout est sujet à polémique. Mais l'Histoire lui donnera raison en réhabilitant plus qu'une bâtisse édifiée en produits tuiliers, sans charpente. Les Gilardoni méritent mieux que des fragments de tuiles dispersés sur des chemins forestiers. Les lycéens voisins de Henner mettront la main à la pâte aussi en plongeant dans des savoir-faire traditionnels.
Les travaux devraient commencer cet hiver. Par cette renaissance, le maire d'Altkirch s'inspire de Nietzsche, "féconder le passé et enfanter l'avenir".


La maison Haas en 2014


CAROLINE LUX ILLUMINE LE TISSU DE NOEL DE MULHOUSE



C'est dans les murs art déco de la section mulhousienne de la Chambre de Métiers que la Ville de Mulhouse a présenté ce matin son tissu festif, sa marque de fabrique dans l'offre de Noël alsacienne. 




Première surprise, le tissu rouge constellé d'étoiles dorées détonne avec le faste des précédentes années. J'avais l'impression de revoir un des tout premiers modèles du marché de Noël mulhousien. On sait l'attachement de Michèle Lutz à ce produit conçu dans la cité du Bollwerk. La maire a voulu un tissu qui transmette "des valeurs, l'unité, la solidarité". La municipalité avait, au sortir de 2021, sondé les acteurs du marché et le public. Ce dernier souhaitait un retour à l'atmosphère de la Nativité, ce qu'approuve la maire. "On s'est parfois égarés par le passé", concède Michèle Lutz. Finis le baroque, les volutes, les motifs complexes, les couleurs audacieuses. Retour au rouge, en quatre nuances, couleur "de vie, de sang, de chaleur, de sobriété ..."


Caroline Lux



Deuxième surprise, Marie-Jo Gebel n'est plus dans le coup. Michèle Lutz coupe court à la rumeur : non, elle ne s'est pas fâchée avec la décoratrice locale qui a longtemps habillé l'Avent à Mulhouse, mais Marie-Jo n'a pas candidaté cette année, trop occupée à un autre chantier dans l'agglomération. Comme toujours, un appel d'offre à été lancé et c'est Caroline Lux qui l'a gagné. Les candidats ne se sont pas bousculés d'ailleurs. Michèle Lutz aurait apprécié que la  planète Motoco qui fourmille de créateurs s'y intéresse... 

Caroline Lux, ingénieure textile, est la créatrice de la marque Avenue d'Alsace. Elle s'investit à Mulhouse et s'est inspirée elle aussi des collections du MISE. Elle se réjouit du travail d'équipe. Son tissu est agrémenté d'étoiles dans un or en deux nuances. Astres fixes, en constellation, filants. Si la sobriété est désormais affichée partout, le tissu portera toutefois le nom de "Scintillance". Imprimé à Munster par Euro TF, il sera labellisé "Alsace Terre textile".


Le marché de Noël de Mulhouse sera envoyé le 24 novembre. Dès lors, les amateurs et collectionneurs du tissu festif pourront s'en procurer à la boutique dédiée et animée par l'office de tourisme.




30 septembre 2022

L'ECOMUSEE DE JEBSHEIM

Soldats français, tenues américaines et grenade jaune du début de la guerre


 Jebsheim, janvier 1945. Le village clé de la Poche de Colmar. Pendant une semaine, cette commune va subir un feu d'enfer inversement proportionnel à la glace de l'hiver, avec un mercure aux environs de -20°. C'est la Bataille de Jebsheim que deux associations de reconstitueurs, Soldats d'hier et Alsacemilitaria avec le soutien d'autres ont commémorée les 24 et 25 septembre à l'Ecomusée d'Alsace.






Le village alsacien rappelant le début du siècle dernier se prête particulièrement à ce travail de mémoire. Il ne s'agit pas de représenter la guerre mais de chercher à comprendre, expliquent, devant une délégation du 1er RCP et d'autres officiels, les représentants des acteurs du week-end. L'Histoire ne doit pas être le seul champ des historiens, elle doit se partager. Le 1er Chasseurs Parachutistes de Pamiers (Ariège) fondé en 1943 au Maroc est le plus ancien dans sa catégorie. Il a payé le prix fort dans la région du Rhin supérieur. Jebsheim ne l'a jamais oublié. Elle est sa commune marraine et l'associe régulièrement aux commémorations de janvier. Les trois militaires en visite à l'Ecomusée soulignent le lien fort armée - Nation en Alsace et sont ravis de leur voyage mémoriel.



 L'officier tradition en profite pour traquer les fautes d'habillement des soldats. "Un uniforme se porte, on ne se déguise pas." Effectivement, les participants mettent un point d'honneur à la justesse de leurs effets, en évitant les anachronismes. On porte jusqu'aux lunettes réalisées à partir des modèles d'hier. Tout n'est pas d'origine bien sûr, comme la veste de ce sous-officier allemand. Il faudrait débourser plus d'un millier d'euros me confie celui qui la porte, un Munstérien entré dans la vie de son personnage depuis plus d'une décennie. Il campe un chasseur de montagne aguerri au front norvégien.




En parcourant le village, je m'arrête devant une mitrailleuse tenue par un soldat français. Elle date de la Grande Guerre, avec un système de refroidissement à eau. Le métal chauffe vite. Plus loin, une cuisine de campagne, alimentée à l'essence. Les hommes prennent des forces avant d'en découdre.








A Jebsheim cet hiver 45, le village avait changé de mains trois fois. Plus de 900 personnes y laissèrent leur vie, plus de 2000 furent blessés. Pour certains libérateurs, c'était le Verdun alsacien.
Les reconstitueurs reproduisent les pions d'une guerre imposée comme celle d'Ukraine. Leur témoignage œuvre en faveur de la paix. Celle qui se construit par la connaissance de l'autre. Le tourisme de mémoire lui continue de se développer. Alsace Destination Tourisme se rapproche de la Route de la Libération de l'Europe. Le Pays de Colmar ne manque pas de lieux significatifs, comme le Pont des Américains récemment célébré à Horbourg-Wihr.





20 septembre 2022

BiObernai, BiEAUbernai en 2022


Plus de 19.000 visiteurs pour le Salon de l'Agriculture bio, de la Terre et des Hommes.
Entre les gouttes, après la sécheresse, on y a débattu de la "Précieuse eau".



Bernard Fischer, Miss Alsace 2022 Camille Sedira et Maurice Meyer


C'est toujours un plaisir d'aller à Obernai, deuxième ville touristique du Bas-Rhin. 
Cette fin de semaine, aux habituels touristes du pays de Sainte-Odile se mêle le public de BiObernai.
J'en ai régulièrement parlé dans mes narrations journalistiques. J'ai fini par m'y rendre et je ne regrette pas les 111 km qui séparent la ville moyenne de ma capitale du Sundgau. 



Vendredi milieu d'après-midi. Jour 1, les premiers visiteurs ont déjà fait leur tour. Je trouve une place de stationnement pas très réglementaire, mais c'est un contexte de manifestation. J'entre dans le périmètre quand Marie-Isabelle en sort. Une autre Haut-Rhinoise en terre obernoise. Cheffe de projet événementiel à Colmar Expo, elle travaille avec l'association de la foire bio d'Alsace, cette pionnière de presque 40 ans. La jeune femme est venue voir les exposants qu'elle connaît et  trouver ceux qui pourraient rejoindre la grande famille colmarienne. Elle repart séduite par BiObernai. Nous évoquons Rouffach, la foire dans les remparts hier. Une autre époque, une atmosphère nouvelle à ses balbutiements. Ici le salon a pris ses quartiers au voisinage des contreforts. Pour faire tourner une telle organisation, il faut de nombreux bénévoles, présents dès l'accueil. 




Le temps grimace, j'ai pris une averse dans la Vallée noble, mais les visages sont souriants ici. Ce n'est certes pas la foule encore, mais quatre lascars en ciré jaune amusent la galerie. Ils se présentent comme "les marins-pêcheurs de Furdenheim". Il s'agit de comédiens ambulants qui évoluent à palmes en poussant la chansonnette. Premier arrêt au stand Baumstal. 


Une marque qui fête ses 50 ans pour des produits garantis à vie. Je fais la conversation avec Pascale, responsable commerciale, et son binôme venu en renfort. Les ustensiles de cuisson inox 18/10 font le bonheur des ménagères. A l'origine, Lucien Baumlin, un industriel de Wittisheim, dont les faitouts traversent le temps et sont garantis à vie.

 Au cœur du salon, à proximité de la halle de marché, se prépare le vin d'honneur. Kougelhopfs et viennoiseries sont fournis par la boulangerie Schwartz, bien connue dans la cité de sainte Odile. La maison tient son stand à côté et présente ses succulentes productions. Une avenante vendeuse à l'accent roumain me donne les explications, rejointe par Pauline, l'épouse de Thierry Schwartz. Le chef étoilé (un macaron Michelin et un macaron vert) a appris à faire son pain à Rosheim. Comme pour sa cuisine, il s'approvisionne au plus près. Justement le voici, affairé à sa marchandise. Nous prenons le temps d'échanger rapidement. Le beurre de Heiligenstein, les jersiaises, les légumes oubliés, le manque de main d'œuvre...Je considère le pumpernickel, ce pain d'après-guerre et nordique, mais surtout les bretzels, confectionnés comme autrefois, les seuls labellisés Ecocert et parsemés de fleur de sel. Ma mémoire gustative saura s'en souvenir. 



Un gaillard me salue. C'est Maxime, des chaussettes Labonal. Un arrêt au stand du fabricant de Dambach-la-Ville où je fais la connaissance de Samy, le nouveau responsable de la marque La Frenchie by Labonal.

Il est en discussion avec un binôme de gendarmes. Sous la halle, je capte Gilles, l'éternel gardien de l'espace DKL. D'autres ondes plus loin, Fréquence Verte. Comment ne pas penser à  Radio Verte Fessenheim dans les années 70... 








Entre-temps, la visite inaugurale va finir. J'ai croisé Bernard Fischer, le maire, aux petits soins de l'invitée de marque Camille, fraîchement élue Miss Alsace. Au moment des courtes allocutions, le soleil revenu pose ses rais sur l'assistance, précédée des joyeux comédiens. J'ai l'occasion enfin de rencontrer de vive voix Maurice Meyer, le créateur et directeur de BiObernai. L'an prochain, ce sera la 20e. Pas de thème précis, avance l'agriculteur. Juste la fête pour se retrouver dans cet univers du mieux-être. 










12 septembre 2022

UNE TOURNEE CHEZ GUSTI A HIRSINGUE





Hirsingue, jeudi 1er septembre, vers 19 heures. En quittant mon véhicule près de la poste, je perçois un brouhaha qui s'échappe des fenêtres de l'ancien restaurant "Au Raisin" rue du général de Gaulle. Une bâtisse ancienne aux murs colorés par le temps, pour quelques heures encore the place to be. C'est le dernier jour d'ouverture du bistrot temporaire. "Chez Gusti" indique un écriteau.
-Qui est Gusti (Güschti aurais-je écrit) ?                                                                        -C'est un peu nous tous, répond Georges, qui depuis une semaine court dans tous les sens pour assurer la bonne marche de la maison. 

Toute la famille est réquisitionnée, enfants et petit-enfants. Ils sont peut-être huit à s'affairer le dernier soir dans une salle aussi bruyante qu'un cours sans prof. Le café est plein comme un œuf, il a fallu rajouter quelque vingt chaises pour faire s'asseoir tous les convives. Je reconnais quelques têtes en montant vers la cuisine, où je retrouve une vieille connaissance. Récemment, un jeune homme m'avait reconnu, nous jouions aux échecs dans les années 90. Georges me sert un Spritz, un cocktail d'aujourd'hui. Il me parle des changements de consommation et nous échangeons sur l'école, en ce jour de rentrée, comme il était enseignant dans sa vie active. Le va-et-vient continue dans la cuisine, les verres à laver entrent, les bouteilles sortent. 


Je crois avoir découvert "Chez Gusti" en 2016, lors d'une ouverture temporaire déjà. J'aime les estaminets d'un autre temps comme les cafés qui ont survécu. Le bistrot de Hirsingue s'est tu voilà plus de vingt ans, mais c'est comme s'il n'avait jamais fermé. Parquet, tables, nappes, tapisseries...Rien n'a changé. Les lustres boules rappellent mon école. Les verres sont éclatants dans le vaisselier. Les cendriers ont certes disparu, mais l'atmosphère est celle d'un débit de boissons convivial. 


C'est en 2004 que le débit de boissons a rouvert pour la première fois depuis le décès de la maman de Georges. Parfois pour des événements, désormais pour conserver la précieuse licence. La crise sanitaire a bousculé le calendrier, d'où la réouverture cet été. Elle serait heureuse, la regrettée exploitante, de voir tant de monde ce soir, mais préoccupée aussi de l'accueil. En attendant, dans ce chahut joyeux, chacun a une histoire à partager. La vie de Hirsingue hier ressurgit, les plus âgés se rappellent peut-être que les Allemands occupaient les lieux pendant la guerre. Le café, c'est l'âme du village.
Georges et sa famille vont pouvoir souffler tout à l'heure quand le dernier client sera parti. "Chez Gusti" va entrer dans sa longue somnolence. Mais ses murs fatigués retiennent les souvenirs.  










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