3 septembre 2017

SAINT-LOUIS : DIALOGUE A LA SYNAGOGUE






Dimanche 03 septembre. C'est la rentrée des associations à Saint-Louis, qui animent joyeusement le Forum. A côté, des enfants jouent dans l'enceinte de l'école. Rue de la synagogue, je repars à la découverte du judaïsme à l'occasion des Journées européennes de la Culture et du Patrimoine juifs en France. En Alsace, plusieurs sites sont ouverts aujourd'hui, dont la synagogue de Saint-Louis.
Porte de France, on estime entre 200 et 250 le nombre de juifs, à peine un peu plus de 1% de la population de la troisième ville du Haut-Rhin. Mais suffisant pour maintenir le souffle de la Torah.
C'est d'ailleurs dans le Grand Est qu'on recense le plus de lieux de culte israélites. Saint-Louis s'inspire de Soultz-sous-Forêts. De style néo-byzantin, la synagogue fut achevée en 1907, dessinée par l'architecte mulhousien Alexandre Louvat qui lui donna deux tours coiffées de bulbes. Le Sundgau fut terre de judaïsme avec la prospère Durmenach, mais aussi les deux Hagenthal et Hégenheim. Saint-Louis vint plus tard, au début du XXe et le bâtiment à damiers fit l'objet d'une extension en 1933 avec l'apport de juifs fuyant le nazisme. L'édifice fut profané pendant la guerre. Restauré à la Libération. Aujourd'hui, on y vient seulement le samedi, m'annonce Marc Meyer, en poste ici à partir de 1966. Après près de quatre décennies de ministère, il passa le témoin à son gendre Raphaël Breisacher. L'ancien rabbin partage volontiers ses souvenirs et sa science. Marc Meyer aime sa synagogue. De l'intérieur, car dehors, les briques ne sont pas à son goût. Il m'indique la Tenture pourpre, qui a la particularité de se fermer et de s'ouvrir verticalement. Elle est ornée aussi de lys, pour rappeler la cité aux trois fleurs.
Le religieux en retraite se félicite de l'intérêt pour les JEPJF, qui permettent aux juifs de s'ouvrir au monde. "En temps normal, soupire-t-il, on est entre nous". Et de moins en moins nombreux.
Il est loin le temps où il fallait acheter sa place pour entrer dans la synagogue de la rue éponyme, à Saint-Louis. 



1 septembre 2017

FAIRE CORPS AVEC LE JARDIN EPHEMERE






Derniers jours d'août. La minérale place de la Réunion dans le cœur historique de Mulhouse se pare, devant les marches de Saint-Etienne, d'une construction végétalisée. C'est le retour du Jardin éphémère. Depuis une douzaine d'années, les jardiniers municipaux donnent le meilleur d'eux-mêmes pour le réaliser. Précédemment on parlait du SEVE ; désormais c'est le JPEV comme Jardins publics Espaces verts. Il est seize heures ce 31 août, deux tours d'horloge avant l'inauguration officielle, dans une atmosphère brutalement rafraîchie. Du brûlant épisode nous sommes presque en automne, comme semble l'attester le bouleau dressé au centre du paysage provisoire, avec son feuillage en partie jauni. En fait, l'arbre a souffert des fortes chaleurs, explique Alain Genewe, responsable maintenance au service, notre guide de presse. Des enfants, des adultes passent et posent sur les plaques de pelouse qu'ils fragilisent d'autant. "C'est un décor de théâtre" , déclare le technicien du JPEV. Mais ni panneau d'interdiction ni agent pour rappeler le public aux règles élémentaires du savoir - vivre au jardin. Un jeune adulte est assis sur un banc, forme noire sur fond blanc. Cette année, les bancs sont partie intégrante de l'espace. Quiconque s'y pose devient acteur de l'espace. 
Le Jardin éphémère a été installé en trois jours, préparé dans les serres comme un kit à revêtir d'une trentaine d'espèces de vivaces, vêtement de bacs de bois et métal. Un fond sonore adoucit la flânerie dans cette composition d'une centaine de mètres carrés.
Quand la nuit tombe, la musique change et l'éclairage ouvre d'autres perspectives.
Le Jardin éphémère s'éteindra dans trois semaines. Il est porte d'entrée aux Journées d'Octobre (5 au 15) dont le spectacle s'annonce particulièrement floral. Pourtant, le dixième mois de l'année est encore loin. Marquer un temps d'arrêt dans cet écrin délicat, c'est bouter la rentrée hors de son calendrier, prolonger les vacances ou les convoquer en pensée.
Les bassins entendent susurrer les filets d'eau. Les touristes passent.
L'été continue à Mulhouse.


30 août 2017

UNE COUPE A ROPPENTZWILLER



Roppentzwiller, entre Waldighoffen et Durmenach, Sundgau.
Au croisement de la rue principale et de la rue de l'école, l'ancien café "A la Choppe" crée l'animation ces jours-ci. C'est l'ouverture conservatoire pour conserver la précieuse Licence IV. Trois ans se sont écoulés depuis mon dernier passage et pourtant rien ne semble avoir changé dans cet immeuble angulaire couleur brique. Marie-Juliette, peut-être, n'est pas là aujourd'hui. C'est l'exploitante d'hier, nonagénaire. Le bistrot est devenu silencieux en 2009. Il est toujours en vente, après des transactions avortées.
J'aime les troquets du temps passé. Les papiers peints remontent aux années 60 si j'en crois Morand, un voisin attaché également aux choses de nos aïeux. Il est venu avec son petit-fils.
Le plafond laqué reflète sa couleur café crème en harmonie avec les tons rustiques du bar et de la salle. Quelques hommes conversent avec Patrick, l'héritier, et son fils Anthony. Eux non plus n'ont guère changé en trois ans.
Hier soir, La Choppe a fait le plein. Musique de potes et cuisine thaïlandaise dans un bistrot de chez nous. C'est cette ambiance que j'essaie de retrouver en considérant les tables et les chaises soigneusement disposées, tout en savourant ma coupe de champagne. Un breuvage d'or  pour célébrer ce réveil éphémère au cœur du village. Un bonheur simple en échangeant avec les consommateurs et le barman. 

Ouvert en 1929, le café a vu passer des générations de cultivateurs et d'ouvriers, proche du canal de l'usine et de la gare qui ne sont plus que des souvenirs. 
Les bulles de ma coupe sont les paillettes du temps qui passe.
Je dois reprendre la route, heureux de ces retrouvailles, les dernières peut-être. Dans trois ans, La Choppe sera peut-être convertie en appartements. 



 

29 août 2017

L'AUBERGE DE L'ILLBERG




M2A ouvre les portes de ses sites le 02 septembre. Ils sont une trentaine dans l'agglomération. A deux kilomètres du centre-ville de Mulhouse, surplombant la plaine sportive, l'Auberge de Jeunesse.

Dans son cadre verdoyant, une institution qui a fêté ses soixante ans en 2014 et désormais sous la tutelle de l'office de tourisme et des congrès. L'établissement avait redémarré au printemps 2016 après quelques mois d'inactivité. Avec 103 lits, un parc arboré et une situation enviable proche des infrastructures sportives - palais des sports, piscine olympique, patinoire - , l'AJ de Mulhouse fait le bonheur de toutes les générations et de publics divers : jeunes, étudiants, scolaires, familles, cyclosportifs et sportifs tout court. Pour les Mulhousiens, ses salles de réunion permettent d'organiser assemblées générales et séminaires.
Labellisée Familles Plus, la maison fait encore valoir son agrément Tourisme et Handicap pour les quatre déficiences. 





Lysiane l'accueillante  maîtresse de maison


Auberge de Jeunesse Mulhouse 37, rue de l'Illberg.
Portes ouvertes le 02 septembre. 
www.mulhouse-alsace.fr 




27 août 2017

75E ANNIVERSAIRE DE L'INCORPORATION DE FORCE A RICHWILLER

Plusieurs centaines de personnes ont pris part à la journée de commémoration portée par la ville du Bassin potassique, une commune qui dispose d'un monument aux Malgré-Nous.





" L'Histoire de France ne comporte pas que des pages glorieuses."
Le préfet du Haut-Rhin Laurent Touvet s'est associé  à la douloureuse mémoire de l'Alsace qui rappelle ces jours-ci l'incorporation de force de ses fils dans l'armée d'occupation. Le 25 août 1942 résonne pour longtemps encore comme le glas d'une jeunesse sacrifiée sur l'autel du nazisme et envoyée dans l'enfer. Au-delà de ces garçons qui n'espéraient que grandir, le martyre de toute une région.

Le 25 août 2017, les églises d'Alsace ont activé les cloches pour marquer le 75e anniversaire du décret du gauleiter Robert Wagner, administrateur zélé de la province annexée de fait par les Allemands en 1940. Jusqu'en 41, les armées du Reich écrasaient tout sur leur passage. Mais bientôt, il a fallu trouver des renforts. En Alsace - Moselle, 130.000 jeunes gens allaient être enrôlés, des classes 1908 à 28. Les derniers n'étaient encore que des enfants, jetés sur tous les fronts après une sommaire instruction. Certains ont intégré les Waffen SS, ce qui réduisit d'autant plus leur espérance de vie au combat. Malheur aux vaincus. Le dernier Alsacien prisonnier des Soviétiques fut libéré en 1955. 


Le préfet Laurent Touvet
René Baumann, 94 ans


Les Alsaciens ne voulaient pas de l'uniforme feldgrau. L'administration nazie aura tôt fait de les mettre au pas, en punissant les réfractaires et leurs familles, internées à Schirmeck, cependant que les biens étaient saisis. Pour l'exemple, on fusilla, comme les évadés de Ballersdorf dans le Sundgau. 

Tout cela a été rappelé le 27 août à Richwiller, où une cérémonie départementale a été organisée par la Ville avec de nombreux partenaires, dont la société d'histoire locale. Le maire Vincent Hagenbach est lui-même fils d'incorporé. Le 8 mai est toujours difficile à célébrer, rappelle l'élu, car si la France fête la Victoire 1945, "l'Alsace se souvient du retour dans l'indifférence générale, mais surtout avec un sentiment de honte" de ceux qu'on appellera les "Malgré-Nous", quand ils ont eu la grâce  de rentrer. Deux adolescents de Richwiller ont lu deux lettres émouvantes d'enrôlés alsaciens rédigées avant leur dernier souffle. Les deux soldats ont été condamnés à mort le jour de l'Assomption. Ils devaient finir pendus.
C'est à toutes ces victimes, aux incorporés de force des deux sexes, en ajoutant le RAD puis le KAD, à leurs familles, à l'Alsace en définitive, que Richwiller pensait ce dimanche d'été, devant un parterre d'anciens combattants dont une quarantaine de survivants de l'annexion. 

"On connaît mal en France l'incorporation de force", tente le préfet Touvet. Les enrôlés ont longtemps été oubliés. La désinformation a alourdi le poids de la souffrance et si l'Allemagne a consenti un dédommagement d'un millier d'euros par homme réquisitionné, la jeunesse de nos aïeux a été perdue.
"On aimerait juste la reconnaissance de l'abandon de l'Alsace" avait lancé préalablement le maire de Richwiller. 

Le représentant de l'Etat a pris la dimension du drame. Laurent Touvet concède qu'on "ne construit pas l'avenir sans connaître l'histoire".  




La fanfare des hussards d'Altkirch


Les véhicules de la collection Hess

C'est à Notre-Dame d'Altkirch que nous avons confié à Dieu Eléonore cet après-midi. Cela faisait longtemps que je n'y suis pas retourné pour un office, m'étant exilé liturgiquement dans la vallée de la Largue. C'est pourtant dans cette église qui a accompagné ma vie chrétienne pendant quatre décennies que j'ai croisé naguère la défunte. Elle m'a semblé un peu vide d'ailleurs aujourd'hui, mais Eléonore était nonagénaire, retirée de la vie professionnelle depuis fort longtemps et du fait de son grand âge, beaucoup de ses contemporains l'avaient précédée dans le grand voyage. Les vieilles amies qui se rapprochent du siècle de longévité comme elle étaient là aussi. Les descendants ont rappelé le parcours à la fois heureux et douloureux de la défunte, qui s'en est allée avec son éternel sourire. 
Eléonore ce soir repose dans la paix du cimetière d'Altkirch, sous un ciel étoilé. A cet instant, il me revient cette recommandation tirée du Petit Prince, regarder les étoiles et les imaginer rire.
Eléonore m'avait enseigné que pour vivre sereinement, il fallait considérer le monde avec des yeux d'enfant. 

Je ne crois pas avoir beaucoup grandi. Je ne crois pas avoir voulu grandir. Mais ce soir je me sens un peu plus orphelin.

Au revoir Eléonore

22 août 2017

L'ASSOMPTION D'ELEONORE

Eléonore. Son seul prénom était lumineux et sonore. J'avais plaisir à le prononcer. Aujourd'hui elle n'est plus. Eléonore s'est endormie, rappelée à l'issue de son très long pèlerinage terrestre. Je n'ai pas eu, pris le temps de la revoir. Je l'imagine endormie avec son indissociable sourire.
C'est professionnellement que j'ai appris à connaître Eléonore, alors que j'écrivais pour "L'Alsace" je pense. C'était il y a près de trente ans. Elle comptait aussi parmi mes fidèles auditrices. A l'époque, elle donnait le bras encore à son époux fatigué. Elle a poursuivi la route seule, bien des années après son départ, toujours digne, la voix posée et douce, la lumière dans les yeux rieurs, l'esprit philosophe. C'était une petite dame, qui dans sa carrière s'était occupée d'enfants et de professeurs. Sa droiture, son intelligence, son charisme faisaient d'elle une personne attachante. 

J'ai eu le bonheur de la connaître, de la croiser souvent, de l'accueillir à La Brigantine où elle appréciait les produits de la mer. Nous avons  beaucoup échangé, refait le monde de nos mots avec des visions différentes que nos générations suscitaient. 
Elle savait donner, sa générosité était sincère. 
La vie le lui a bien rendu, au travers d'une descendance nombreuse. 
Jusqu'à tardivement, elle conduisait sa Renault 4 grise. Puis un jour, elle dut quitter son nid douillet sur les hauteurs d'Altkirch, pour la salle d'attente vers l'ultime voyage. Il m'était insupportable de la voir dans sa nouvelle résidence collective, à attendre que le temps fasse son œuvre. Mais Eléonore ne se plaignait jamais. 
Elle a rejoint là-haut sa vieille amie Thérèse, emportée quelques semaines plus tôt. Et son incroyable complice "le grand Charles", notre facétieux ami commun. Mais d'abord son inoubliable conjoint. 
L'été va s'en aller bientôt. Eléonore s'est endormie dans la joie de l'Assomption, elle qui a aimé Dieu avec ferveur. 
Eléonore avait 96 ans. Elle n'avait d'âge que celui de la sagesse. 


Je vous aimais aussi, Eléonore. 

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