25 juillet 2022

QUATRE JOURS EN FRANCE


JOUR 1    ALTKIRCH - BEAURONNE

 Mercredi 20 juillet 02:00. L'heure du grand voyage a sonné. 7 ans se sont écoulés depuis mon dernier retour dans le Sud-Ouest. Cette fois, les étoiles sont alignées pour mettre le cap sur une terre vacancière qu'il m'a été donné de découvrir à la fin des années 70. Le ciel est clair, il ne fait pas frais. Direction Belfort ou plutôt la Comtoise. Sur l'A36, beaucoup de semi-remorques dans chaque sens. La France essentielle roule. Et nous les touristes. 


Deux heures après notre départ, le péage de Dole est encore endormi. Un arôme de pain et le chant des grillons.  Dès lors, c'est une succession de radars automatiques, dans ce Jura où  la route de Chalon nous fait traverser des villages fantômes. Nous ferons un détour ensuite par Digoin pour la pause recommandée. Le jour s'est levé sur la ville du pont-canal. Un village festif vide, une patrouille d'ouvriers communaux. 



C'est ici que je perds mon latin de conduite. Me voilà bientôt sur la future A79, un chantier de 88 km de l'échangeur de Digoin à Sazeret dans l'Allier. Vitesse limitée à 70 km/h sur l'ancienne nationale. Nous sommes sur la liaison Atlantique - Europe qui expérimentera le péage free-flow par télé-exploitation. 

8 heures après notre départ, Montluçon se présente enfin. Plus de 500 km au compteur. La Nouvelle Aquitaine est proche. La Creuse et ses étangs. Le pays de Jean Patiras, mon regretté propriétaire venu faire sa vie en Alsace après la guerre. Des gendarmes qui contrôlent un Parisien. Il est midi au clocher de Bourganeuf  où nous décidons de nous restaurer. C'était jour de marché. France Bleu Creuse a ajouté à l'animation matinale. En quête d'une table, nous trouvons L'Auberge de l'Atre, où je me prends à songer à Philippe Etchebest dans "Cauchemar en cuisine".

Beaucoup de clients, un bon signe, mais un service qui ne suit pas. Deux femmes courent dans tous les sens. L'une annonce "Allô" ou "Hello" quand elle entre en cuisine d'où s'échappe la voix de la cheffe sans doute, à rapprocher d'une Jackie Sardou. Je suis intrigué par la richesse de la carte, entre cuisine de la mer, terroir, burgers et pizzas, outre le menu du jour. Je commande un burger creusois, qui me rassasiera sans peser sur l'estomac. Parinda se délectera d'une copieuse salade. Dommage que la jeune serveuse fiche ses doigts dans nos verres. 

L'Auberge de l'Atre à Bourganeuf
si on a faim (de cuisine française) et du temps.






La Dordogne enfin avec l'incontournable halte à La Coquille, qui poursuit l'aménagement de son aire d'accueil de camping-cars. Dès lors, il nous faudra encore parcourir une centaine de bornes avant la première destination. Des adolescents s'amusent sur la place de jeux. 

Du côté de Mussidan, quelques emplettes avant de gagner Beauronne où nous attend  Florent… 


















BEAURONNE (DORDOGNE)






Beauronne 1992. Je me souviens de ce festin de roi donné par les époux Ranouil en leur demeure bordant une départementale. Des mets campagnards arrosés de montbazillac 1975 pour finir sur les alcools bruns du Sud-Ouest et les bulles Mumm 1982. Rarement j'aurai été servi avec autant d'égards par des connaissances de vacances. 

Beauronne 2022. 30 ans ont passé, mes hôtes d'hier ont quitté ce monde depuis belle lurette mais ils demeurent définitivement attachés au nom de cette commune rurale du Périgord blanc où le hasard ou non m'appelle.



En quête d'un hébergement dans cette région que j'ai arpentée à de nombreuses reprises, j'ai été séduit par une maison d'hôtes à la campagne, le Moulin de Faye, à Beauronne donc. Comment ne pas être attiré par cette bâtisse typique du XIXe dans son environnement verdoyant ? La forêt de la Double, l'étang de la Jemaye, Périgueux à une demi-heure de route… 
En quittant Mussidan et les grands axes routiers, il faut s'engager sur un chemin qui nous emmène vers ce paradis. Un hameau constitué notamment d'un ancien moulin et de cette habitation de 125 m2 au sol. J'ai pu échanger au téléphone juste avant avec Florent, le propriétaire qui nous attend. Je ne le connaissais pas, mais c'est comme si c'était un ami de longue date. Dans son sillage, une chienne avance sa truffe. C'est Donna, un des habitants du domaine. Pour être au complet, la chatte Vénus, très discrète pendant notre court séjour.


L'accueil est aussi odorant. Il faut traverser une haie de lavande avant de pénétrer dans la vieille maison, retapée avec des matériaux traditionnels. Nous dormirons à l'étage, dans une spacieuse chambre, dans un lit à baldaquin en bambou. 

J'ai vite adopté cette demeure décorée sobrement mais où chaque saison doit être un roman. Les poutres apparentes, le plancher, le dallage ancien rassurent. Notre salle de bains est aussi généreuse.

Florent offre le verre de bienvenue. Il a deux autres hôtes ce soir, Eric* et Sandra* venus de Barcelone. Le premier est un ancien collègue, la seconde sa fille. Bientôt, les trois  nous laissent la maison pour aller pique-niquer un peu plus loin. Parinda et moi dînons rapidement sur la terrasse tout en longueur, avant de faire une petite promenade alentour. Je marche pieds nus sur la chaussée encore tiède, considérant la rivière et les arbres alignés comme des soldats.

Nous nous retrouvons tous enfin autour de la table pour parler de nos voyages et de nos vies. Un voisin rapplique, Steve, qui nous fait déguster du veau façon gitane. Ici, on est dans le partage et la convivialité. Le tutoiement est une évidence. C'est comme si on s'était toujours fréquentés. Florent veille d'ailleurs à ce que ses visiteurs se sentent chez eux dans ces vieilles pierres qui auraient tant à raconter. La journée a été interminable pour moi, il faut songer à se reposer. Dans ma couche rustique, je dormirai comme un loir, oubliant de contempler la nuit périgordine. Pas de pollution lumineuse. Pas de télé non plus. On choisit le moulin de Faye pour débrancher, même si le wifi est garanti. 



Le lendemain matin, pas le temps de s'attarder alors que tout invite à prolonger le moment. Florent ne se couche pas tard et se lève tôt. A l'heure du petit déjeuner, il fait tourner le lave-linge. C'est lui qui tient la maison. Quelques fleurs égaieraient cette vénérable maison où je n'ai vu ni pendule ni horloge. 






Chambres d'hôtes de Faye
24400 Beauronne
07 69 85 72 23

                                             contact@chambre-hote-dordogne.fr





* les prénoms ont été changés


JOUR 2   BEAURONNE - LOURDES 




Dommage de quitter trop tôt cette terre de Dordogne mais mon voyage est aussi un pèlerinage. Je voulais retourner à Lourdes. Hasard du calendrier, je vais croiser le Tour de France. La Grande Boucle quitte le sanctuaire pour Hautacam. C'est là que Pogačar va être dépossédé de son maillot jaune. Mais ma route étant toujours plus longue que prévu, je gagne la ville mariale une heure après le départ de la course. Tant mieux, je vais pouvoir faire le détour par Lestelle-Bétharram dans le département des Pyrénées-Atlantiques. C'est dans cette commune que ma famille avait été cherchée il y a plus de 40 ans, en descendant d'un train à banquettes en bois. Les supports de caténaire ont eu le temps de rouiller un peu plus. St-Pé-de-Bigorre à quelques kilomètres est toujours si étroit dans sa traverse. Le Tour ne semble déjà plus qu'un souvenir alors qu'il vient de passer. Un car ramasse un peloton de gendarmes, tandis qu'un autre isolé attend son tour. Plus loin, un camping affiche la marque d'une émission vacancière de télé. Nous n'en ferons pas notre paradis. 




Le clocher de Bétharram se présente enfin, comme je l'ai toujours connu. La fontaine de St-Roch distille son eau réputée réparatrice de bobos.  Je me gare près du pont au pied duquel se sont joyeusement posés des adolescents. Ils ont fait du gave leur piscine et les filles se fichent de leurs fesses dénudées sur un lieu de recueillement. Les gars ignorent mêmement l'interdiction de plonger et de se baigner pourtant bien lisible. Interdire c'est appeler à transgresser. 



Pour la première fois en 40 ans, je vois le collège, en retrait. Un tout jeune prêtre en soutane est assis devant une porte. D'autres jeunes viennent et vont, comme un groupe de touristes. Le chemin de croix est en travaux. Les monuments en rénovation. Pour atteindre la partie sommitale, il faut contourner ou prendre la voiture. J'étais venu aussi chercher la sépulture de notre ami Joseph Domecq, ancien chargé d'âmes de Notre-Dame de Bétharram. Décédé en 2018, il repose parmi ses frères, partageant la tombe d'un prédécesseur rappelé un siècle plus tôt. 




J'ai toujours une grande joie d'entrer dans l'église bordant la rivière. L'odeur des vieilles demeures et de l'encaustique...Une maison de Dieu bien entretenue. Les reliques de saint Michel Garicoïts, le vitrail de St-Jacques, mais le petit magasin a disparu, ne laissant que des bouquins et des cartes postales. Quant au musée, il n'a dû voir de visiteur depuis longtemps. 
Plus loin, notre Hôtel des Touristes de 1980 est encore en activité, avec une autre raison sociale. Je me souviens des récurrentes glaces rhum - raisins et de ce jeune serveur. 














Retour à Lourdes où le trafic me semble moins dense que d'habitude. Je trouve à me garer sur un parking proche de notre hôtel, où bientôt paraît Pascale, toujours aux affaires. Mauvais signe, la salle du restaurant n'est pas apprêtée, les tables et les chaises  sont empilées. Nous ne dînerons pas à l'Océan ce 21 juillet. L'exploitante manque de bras. Pas de service le jeudi soir. Pascale veut bien m'indiquer l'une ou l'autre adresse, quand elle se demande comment aider un couple de Parisiens dans l'attente d'un taxi. Voilà une heure que ces seniors ont appelé un service pour les ramener à l'aéroport de Tarbes. Voyageurs d'un jour, ils doivent reprendre l'avion dans la soirée. Je les emmène sur mon initiative. Lui est colombien, elle d'origine espagnole. Ils économiseront une trentaine d'euros. 




Entre-temps, Parinda a pris possession de la petite chambre au 3e, avec balcon. Elle offre une vue sur une artère de la ville. Nous nous rendrons finalement au sanctuaire en soirée, après le dîner. 








Pascale n'a guère changé depuis notre dernière rencontre en 2015. A l'époque, c'était avec maman. Aujourd'hui avec mon épouse. L'hôtelière a mon âge mais une forte envie de souffler. Elle est sur le pont tôt le matin pour des journées qui n'en finissent pas. Les intempéries et la crise sanitaire lui auront coûté. Elle rêve de changer de vie au soleil de Provence. 
A Lourdes, beaucoup d'hôtels sont des immeubles fantômes. 

Hôtel - restaurant OCEAN
6 & 8 avenue Maransin
65100 LOURDES
www.hotel-ocean65.com 







Dîner au Bon Sens à Lourdes 



Alexandra by Maryline 




Difficile de trouver le bon restaurant dans une ville qui attire les touristes du monde entier mais d'abord des pèlerins. C'est mon cas. Je ne viens pas dans la cité mariale pour faire bombance. La simplicité me va, du moment que la cuisine est bien faite. Notre hôtelière nous a rapporté que des clients avaient eu des problèmes gastriques en choisissant les tables bon marché. L'établissement dont j'ai retenu le nom sur sa recommandation est malheureusement réservé pour une soirée privée. Nous déambulons à cet instant rue de la Grotte, musicalement animée, entre le duo pop rock sur sa scène là-bas et le DJ au voisinage du cinéma. Je considère la carte et la façade d'un restaurant fréquenté, "Alexandra". Une clientèle adulte, un service accueillant. On nous indique la dernière table disponible à l'extérieur, un emplacement qui me donne d'observer avec un œil journalistique l'activité de cette rue à sens unique où les restaus se succèdent dans une diversité à l'image de la ville. "Nouvelle ambiance, nouveau style" promet l'office de tourisme. Nous allons faire la connaissance de Maryline, une Haut-Rhinoise venue s'établir dans les Hautes-Pyrénées. Elle tient la maison avec son conjoint. Deux autres collaborateurs participent au service avec entrain et professionnalisme. Dîner au bord de la route n'est pas dans mes habitudes, mais je vais oublier les voix viriles du fast food et les voitures du Tour de France qui déposent les reporters habillés comme s'ils allaient passer l'automne. Je prends le menu gourmand. Pour 26 € je vais apprécier l'amuse-bouche, le foie gras du chef, le filet de truite fumée et sa purée de pois et l'inoubliable profiterole au chocolat. Un vin de la Loire escortera l'ensemble. Je me surprends à boire beaucoup d'eau. Le voyage donne soif. J'aurai goûté encore les pains maison, un bonus. Tout en échangeant avec les avenants serveurs.

Alexandra by Le Bon Sens 

3,rue du Fort 65100 Lourdes  


 LOURDES




J'ai visité et séjourné à Lourdes à de nombreuses reprises en quatre décennies. A la recherche du temps perdu, mais d'abord en pèlerin. En 2015, j'étais venu chercher ma "feuille de route" sollicitée auprès de Marie. C'est aujourd'hui un peu la même démarche, doublée d'une action de grâce. Et j'ai toujours gardé une relation particulière avec Celle que "tous les âges diront bienheureuse". Du fait de notre visite à Bétharram cet après-midi, il reste peu de temps pour le sanctuaire des Hautes-Pyrénées. C'est ainsi que Parinda et moi prenons la direction de la Grotte après le dîner. Lourdes est plurielle. Le Tour de France vient d'y passer, mais des véhicules aux panneaux, il est toujours présent. 

Les bars sont animés, les restaurants se remplissent au voisinage de l'esplanade spirituelle et je ressens une émotion en entrant dans le sanctuaire. La procession lumineuse va finir. Il y a foule. Nous allons assister à la dernière messe devant l'endroit où Marie est apparue à Bernadette 18 fois en 1858. La nuit s'est posée sur Massabielle. Le moment est indescriptible. Après l'office, les fidèles se dispersent ou prolongent leur temps de recueillement. Nous nous arrêtons à la fontaine dont les robinets libèrent une eau fraîche. Le gave coule. 










Retour à la civilisation. A l'extérieur, les commerces sont toujours ouverts qui happent les touristes. Je ne sais pas si la longue journée y est pour quelque chose, mais j'en oublie le shopping. En remontant la ville, nous traversons des rues festives et bruyantes. Parinda a besoin d'un shampoing, ce sera chez l'épicier du coin, qui fermera à une heure avancée. Lourdes by night. Quand nous regagnons l'hôtel, la réception est en veille. Pascale est partie, elle qui ne compte pas ses                                                        heures. Je vais dormir comme une souche.







La nuit aura été courte. Je me suis levé tôt pour une expérience qui me tenait à cœur. Aller à la Grotte à la première heure. C'est avec enthousiasme que j'ai repris le chemin du sanctuaire, dans une cité encore endormie mais promise au soleil. A 6H30, les premiers pèlerins sont éparpillés. La première messe est envoyée. Je n'ai pas pris le temps de m'attarder. Quelques minutes encore dans le silence près de la grande statue mariale. Je renouvelle ma promesse de revenir comme on le fait à sa maman. Les nuages bas vont se disperser, la route de l'océan s'ouvrir. 











 




A suivre 

 

  

15 juillet 2022

14-JUILLET AU BAREISS : POUR L'AMOUR DE LA FRANCE




Baiersbronn et son firmament d'étoiles Michelin, dans cette Forêt-Noire chérie des Alsaciens. Dix macarons en 2022 dont trois pour la table de Claus-Peter Lumpp au Bareiss. 
C'est ici que la famille Bareiss pérennise depuis un quart de siècle le déjeuner amical franco-allemand du 14-Juillet.









Cela fait quatre ans que je n'avais pas repris la Schwarzwaldhochstraße mais comment ne pas répondre à cette invitation paraphée par le propriétaire? 

Nous voilà donc à 11 heures 30 tapantes au rendez-vous du Kurgarten. A l'école élémentaire voisine, les enfants animent la cour. Hermann Bareiss accueille ses invités avec un mot pour chacun. Le personnel féminin a revêtu le dirndl tricolore. C'est la France que fête le palace de Mitteltal quand elle célèbre le 14-Juillet. Parmi les convives, de fidèles clients et des personnalités de l'Ortenau et d'Alsace. La musique municipale habille discrètement cette garden-party, passant le relais aux cors de chasse. Champagne. Puis les discours. Hermann Bareiss, en français, va exprimer son bonheur. Il déplore toutefois l'absence de ses proches pour raisons de santé, mais il peut savourer cette joie des retrouvailles. Comme Michael Ruf, Bürgermeister  de Baiersbronn, l'hôtelier n'aura de cesse de rappeler les liens forts qui unissent Allemands et Français dans ce territoire du Bade-Wurtemberg depuis si longtemps et qu'un maudit virus a malmenés au point de fermer les frontières en 2020. Impensable 75 ans après la guerre. Et pourtant. Aujourd'hui, c'est le sol européen que les armes de destruction meurtrissent. On n'y aurait pas songé non plus. Cette année, l'orateur français est Josiane Chevalier. La préfète du Bas-Rhin et du Grand Est saura rappeler combien le Land et l'Alsace ont su collaborer au plus fort de la crise sanitaire, les hôpitaux allemands soulageant leurs homologues voisins. Mais la pandémie n'aura pas eu raison de l'indéfectible amitié franco-allemande se réjouit Hermann Bareiss, dont la préoccupation de toujours est le bien-être de ses hôtes.






L'entrepreneur de l'Ortenau apprécie beaucoup la trilogie de la République française "liberté, égalité, fraternité". Il y ajoute sa gentillesse et clôture son intervention par un vibrant "nous vous aimons". 







A proximité de l'hôtel Bareiss, la Christuskirche 




 Hotel Bareiss, das Resort im Schwarzwald  www.bareiss.com 

11 juillet 2022

ETIENNE BRANDT REFAIT LE MUR PAIEN

 Habituellement, le Mont Sainte - Odile attire plus d'un million de visiteurs par an. Haut lieu spirituel, patrimonial et paysager d'Alsace, c'est aussi le terrain de prédilection d'Etienne Brandt, un personnage qu'il faut avoir rencontré dans sa vie.  




C'est sur un parking en contrebas du sanctuaire que j'ai rendez-vous avec Etienne pour une balade contée autour du mur païen. Nous ne nous connaissons pas mais nous allons nous adopter très vite. L'homme est singulier, coiffé d'un chapeau ajouré et le nez surmonté de lunettes cerclées de bois. Le regard perçant. Une sorte de professeur Tournesol d'apparence, mais un randonneur équipé d'un bâton tortueux et d'une besace… Il emmène pour le compte d'offices de tourisme des groupes en quête d'histoires. Cet après-midi, je serai son seul public, ne ratant cependant aucune miette de sa narration. Le temps est compté, nous avons une heure et demie devant nous. Ce sera par conséquent un condensé du programme préparé pour les visiteurs usuels. 

Etienne a été éducateur spécialisé autrefois. Depuis une vingtaine d'années, il est accompagnateur conteur en montagne. Il a ça dans le sang. Depuis qu'il avait constaté qu'un chemin de pierres se révélerait chemin d'histoires. Qu'il les décèle dans un château ou dans une souche du pays de sainte Odile. Le mur païen aujourd'hui. "Ici, annonce Etienne, c'est le territoire de mon grand-père et de mon père". Le voilà qui se revoit minot emmené sur un site sur lequel tout a été raconté. Magique, fascinant, merveilleux, étrange, mystérieux, énergétique, spirituel… 


Etienne s'arrête et commence à dessiner avec son bâton. "Vu d'en haut, le mur païen ressemble à un papillon géant fossilisé"... La visite s'effectue avec deux Etienne. Le randonneur qui me fait la conversation et le conteur qui prend le relais en faisant tinter un instrument métallique. Dès lors, les vestiges de l'enceinte ressemblent à des bancs d'école en classe verte. Le public s'assoit et écoute attentivement. Ou au contraire l'homme au chapeau s'y pose et lance le court récit. Puis il tire de son sac un breuvage à base de thym qu'il me fait goûter.


Notre guide connaît "au moins quatre histoires du mur païen" autour duquel sont nichés une demi-douzaine de châteaux. Je vais les apprendre rapidement, sans que le narrateur ne me dise sa conviction. A chacun de prendre la version qui lui convienne. Géants, lutins, celtes, extraterrestres… Le Mont Sainte-Odile est réputé être parmi les lieux les plus vibratoires d'Europe. D'ailleurs ma petite heure de marche dans cette forêt digne d'un conte de fées m'a vivifié. Sans parler de l'exaltante rencontre.


Etienne se souvient y avoir emmené Jean d'Ormesson après une émission de télévision. Le défunt académicien y vit "les murs d'une cathédrale" montant vers la voie lactée. Aujourd'hui, le Barrois retrouve des adultes auxquels il avait mis des étoiles dans les yeux lorsqu'ils étaient enfants. Le rêve n'a pas de fin dans ces sentes où chante le vent. Il suffit de le saisir et d'écouter. Le mur païen est long d'une dizaine de kilomètres. Il faisait 5 mètres de haut pour 1,60 de large. Quant à sa datation, l'échelle s'étend de 30 siècles avant notre ère au VIIe de la fondatrice de l'abbaye et patronne de l'Alsace. Laissons cela aux dendrochronologistes.

Etienne pourrait être pédagogue. Mais il préfère évoquer la musique des arbres, "des harpes", pour réveiller le gamin que nous étions comme lui. Ce jour de mai, il m'a fait entrer dans la Brocéliande alsacienne.




Pour randonner en écoutant Etienne Brandt, contacter l'OT d'Obernai. 
Lui écrire à brandt.etienne@gmail.com 


                  www.massif-des-vosges.fr

6 juillet 2022

LES CANONNIERS D'EAU DOUCE DE RULANTICA

 Toujours plus de plaisirs aquatiques au voisinage d'Europa Park. La Wasserwelt du parc d'attractions préféré vient de s'enrichir d'un manège qui fera le bonheur de toute la famille, Tønnevirvel. 


DR Rulantica 


Deux ans et demi après son inauguration, l'univers nordique de Rust a conquis son public. En ce jour de juin, des figurants en costume médiéval esquissent quelques pas de danse parmi des visiteurs en tenue de bain. La famille Mack va ouvrir sous le soleil sa dernière attraction, le carrousel interactif. Une création Twist'n'Splash de Mack Rides, le fabricant de manèges depuis plus de deux siècles. Une réalisation inédite dans un parc aquatique, qui procure rapidement éclaboussures et éclats de rire. Pour la scène inaugurale, un buzzer est activé par un "pêcheur". Roland Mack a enfilé le ciré et le chapeau de pluie jaunes pour se prêter avec l'excitation d'un gamin au jeu. 




Tønnevirvel est un manège doté de neuf embarcations circulaires, sortes de tonneaux aux inscriptions runiques, équipées de six canons à eau chacune. Les adeptes d'Europa Park connaissent les tasses folles du quartier hollandais. Ici, point de précipitation, mais les canots tournent sur eux-mêmes et sur trois plateformes immergées. Dès la mise en eau, les occupants doivent actionner la manivelle de leurs canons pour arroser à tout-va. Les équipages voisins évidemment, mais aussi les tireurs postés autour du carrousel. Pour avoir commis quelques batailles, je crois pouvoir dire qu'on est plus vulnérable à l'intérieur du cercle. En tous cas, une joyeuse récréation de quelques minutes pour une cinquantaine de marins éphémères et leurs ennemis. Les tirs rafraîchissants font oublier un instant les pavés brûlants dardés par le soleil du début d'été.

La plupart des visiteurs sont à l'extérieur en cette mi-journée. Il a fallu investir dans les chaises longues, les sofas et îlots de plage. On pourra s'offrir le luxe de buller à bord d'un yacht VIP. Rangnak, Svensson et Stenrock sont déjà des invitations au voyage statique.

Loin de la mer, on se rattrapera avec la plage de sable et son terrain de beach-volley.






Les estivants de Rulantica se prélassent, s'éclaboussent, glissent et barbotent. A côté de la coquille géante, des ouvriers transpirent. L'univers aquatique va s'agrandir bientôt. C'était dans les tuyaux. 








.

Article épinglé

Nouveau à ALTKIRCH (68130)