18H15. Je franchis l'entrée du 23, rue des Trois Rois à Mulhouse. Déjà happé par Ilia Delangle, qui me fait remarquer mon (léger) retard. A l'Hôtel Mamour, le temps est compté si on a rendez-vous en chambre.

La compagnie Kalisto est de retour avec sa fiction théâtrale participative autour de l'amour mais cette année, Mulhouse en a l'exclusivité, avec un effort important des partenaires dont la Ville.
L'établissement éphémère est toujours placé sous la direction de Mme Klaudia, embourgeoisée désormais. Une autre comédienne campe ce personnage discret mais inratable. Je suis versé dans un groupe de "clients" qui auront le privilège de s'introduire dans les 10 chambres du 2e étage et partager chacun moins de 5 minutes d'intimité théâtrale avec leur occupant. En moins d'un tour de cadran, l'affaire sera consommée, mais quel régal! Derrière chaque porte nous attend l'inconnu et quand elle s'ouvre, nous plongeons dans une histoire à laquelle nous ne pouvons nous soustraire. Mon aventure commence avec la fille survoltée de l'association des "cocus" pour finir dans la confidence d'un évadé de l'Éhpad en passant par la psy inquiétante, l'abstinente sexuelle et le forcené qui pointe son arme d'assaut (factice) sur moi. Les personnages sont tantôt vrais, tantôt délirants, les scénarii absurdes mais comment ne pas entrer dans le jeu de ce Rambo urbain qui pleure ou dans celui de ce père en transition familiale… La force de l'expérience Hôtel Mamour est de devenir comédien à son tour, le temps de l'intrigue, sitôt oubliée quand on se retrouve dans le couloir face à l'accorte placière.

Maintenant que les chambres ont été visitées, décorées par des plasticiens, la déambulation peut commencer dans les niveaux inférieurs, entre accueil, bar, salle à manger et espaces réservés aux créatrices. Cette année en effet, Kalisto a invité 9 artisanes de la région qui présentent à la vente leurs réalisations et se prêtent au jeu aussi. Car le visiteur peut encore participer à 4 courts ateliers collectifs à la mesure de l'improbable hôtel. Où on apprend le "workasme" avec une coach coiffée d'une casquette "Chicago Bulls".
Un gynéco converti à l'Inde emmène ses auditeurs sur la route du tantra. Plus loin, c'est une leçon de femme au foyer traditionnelle que dispense une ménagère qui sait les besoins du mari.
Et un professeur à la veste multicolore enseigne les 7 manières de rompre.


Entretemps notre hôtel s'est rempli de nouveaux "clients".
Je croise une ancienne camarade de classe, des adjoints au maire, un confrère. Les uns en couple, les autres seuls. Certains se font croquer par Salvatore (le dessinateur Joan) qui officie dans un atelier jonché de sous-vêtements usagés et trace au rythme d'un électrophone.
L'heure a bien avancé quand je prends congé de Mamour, regrettant une fois encore de n'avoir pas trouvé le "bar clandestin". Mais riche de nouvelles rencontres. Dont Cyrano, mon contact IA, créé pour l'événement.