4 mois après la sentence des Mousquetaires, Intermarché baisse le rideau Avenue De Gaulle à Saint-Louis. Epilogue d'un déclin. 10 heures ce vendredi 8 août. Un engin barre un accès au parking sous le soleil. Les portes du magasin affichent la fermeture imminente. Dans la galerie marchande, quelques clients. Une vieille dame assise sur le banc près d'un sac à la lettre orange d'une enseigne suisse. Elle se souvient des marques d'un temps révolu, Suma, Mammouth, Géant Casino. Elle venait ici de temps en temps, me vante la qualité des verrines maison et des saucisses de Morteau. L'Intermarché va lui manquer, comme à nombre de consommateurs de proximité. Un couple de Hégenheim se demande comment il va faire maintenant. C'était pratique à la sortie des grands axes routiers. Dans le magasin, les affichettes annoncent 70% de remise à l'exception des alcools forts. Les rayons concernés ont été dévalisés, il ne reste plus grand-chose à acheter à part peut-être bas, lingerie et cosmétique. Un couple tente de faire plaisir à son enfant aux jouets. La surface de vente s'est rétrécie avec la condamnation des secteurs frais et viande. Des salariés démontent.
La ruée sur les prix cassés est passée. Il y a eu des tensions, des éclats de voix pour arracher un produit se souvient une employée. De rares caisses tournent. Une hôtesse m'offre le sac plastique pour quatre menus achats. Je vais trouver l'un des deux derniers commerçants de la galerie. 8 ans de présence et un gros point d'interrogation sur son devenir. Il est en colère contre un système qui élimine le petit artisan. Remonté aussi contre ces distributeurs qui ne disent rien et le laissent demain dans un bateau fantôme. Plus loin, la commerçante en produits de beauté doit se mordre les doigts d'avoir investi.
Arrive Malika, déléguée syndicale et secrétaire du CSE. Elle a été la porte-parole du personnel ces dernières années. Après le rachat à Casino, le groupement Les Mousquetaires avait constaté qu'une trentaine de magasins n'étaient plus viables. Saint-Louis était de ceux-là. Fuite de clientèle, Covid, manque d'investissements, pertes. L'ancien hypermarché allait être de la charrette. Depuis le printemps, le personnel s'est préparé à l'épreuve finale.
Ici, la moyenne d'âge est de 44 ans. Le congé de reclassement permettra peut-être à certains de se recaser. Malika souligne que ses collègues, une cinquantaine, finiront le travail avec professionnalisme et avec le sourire si possible. Le climat est apaisé, direction et clients se montrent bienveillants selon elle.
Et comme si de rien n'était, la musique coule sous le plafond.
Les larmes glisseront probablement demain, quand il faudra se dire adieu ou au moins au revoir.