1 novembre 2020

TOUSSAINT MASQUEE

 



"Je ne suis jamais resté si tard au cimetière" me glisse le vieil homme, presque un voisin, surpris que la nuit s'empare de la ville si vite. Il est environ 17H30. Le jour a décliné en effet et je me suis retrouvé sans doute seul dans la partie haute voilà quelques minutes. Sur l'ensemble du site, nous ne sommes plus que quelques uns. Une heure auparavant, quelques dizaines.
Ce n'est plus la foule à la Toussaint depuis longtemps, même si les tombes sont fleuries. Pourtant cette atmosphère de crépuscule ne m'est pas déplaisante, dans la paix des sépultures à peine dérangée par le murmure de la cimenterie et quelques véhicules qui passent. Les lumignons scintillent ça et là. Le ciel est très nuageux, mais  la douceur nous étreint.


                                                Stèle altkirchoise 


J'ai eu la grâce de croiser, comme l'an dernier, ma vieille amie Marie-Antoinette, au bras de sa fille. Elle a presque 97 ans. Si sa mobilité décroît, sa  mémoire n'a pas défailli. "Le journaliste" m'a-t-elle lancé. A peine plus loin repose depuis trois ans notre regrettée Eléonore, qui aux côtés de son époux, illumine sa tombe de son sourire. Dans la partie basse du cimetière, j'ai découvert aujourd'hui un monument où dorment des militaires, dont l'officier Pierre Goisset, tombé à Altkirch le 7 août 1914.

Quelques jours après le caporal Peugeot, premier mort français de la Grande Guerre, abattu à Joncherey.

Dans la pénombre, j'ai fini par retrouver enfin la tombe de mon camarade Joël, enlevé en 1986. A cet instant, des oiseaux chantent. Cette année il faut porter le masque aux abords et au cimetière. Un homme fumait la pipe à travers ce cache-visage.




C'est la Toussaint. Je me souviens que nous célébrons tous ceux et celles qui nous ont précédés dans la mort. Les saints sont vivants. Avec nos masques, les  visages désorientés, angoissés, voire désespérés que nous pourrions leur présenter, c'est à se demander où sont les morts. 





1 commentaire:

  1. Déjà un peu démoralisée, je ne me suis pas rendue au cimetière... j'aurais aimé tout de même rendre visite à papa sur sa tombe mais voilà... il n'est pas dans un cimetière mais quelque centaines de mètres en dehors de notre périmètre d'un km alors voilà... on ne sait plus ce qui est autorisé ni ce qui nous coûtera 135 euros... quelle étrange et triste période...
    Prenez soin de vous et des votres.
    Toute notre amitié😊
    Lisa-mary, Sam et les petits

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