C'était
dans l'air. Depuis quelques jours, il était impératif qu'on
m'équipât du matériel d'enregistrement à la maison, dans la
perspective d'un confinement. Lundi 16 mars fin de matinée. Mes
collègues disparaissent rapidement, du moins ceux qui restent.
Cependant qu'un autre vient m'installer de quoi télétravailler en
début d'après-midi, je retourne au bureau. Il est quasiment 16H
quand j'ouvre la porte de la radio. Il n'y a plus personne. Célia,
ma stagiaire, n'aura pas fait une semaine complète. On l'a priée de
partir sans qu'elle puisse me saluer. On remettra ça. Je vais
m'atteler à la tâche comme chaque fin d'après-midi, préparant les
journaux du soir avec un ordinateur en moins, délocalisé chez moi.
Je me sens comme seul au monde dans cet immeuble silencieux au
commerce endormi. Je me souviens de mon dernier jour sous les
drapeaux, quand je traînais pour réintégrer mon foyer. Le soleil
se couche, je considère une dernière fois ces locaux vides avant le
saut dans l'inconnu. Je ne sais pas quand je reviendrai. Je ne sais
pas si je vais revenir. Ce maudit fléau qui malmène la planète
frappe sans qu'on ne le voie. J'ai un déchirement au cœur, comme
quand je dois prendre congé de mon épouse à l'aéroport de Zurich.
Mardi 17
mars. Le chef de l'Etat s'est promu chef de guerre hier soir à la
télé. Les Français vont apprendre le confinement. Après la
fermeture des commerces dits « non essentiels » dimanche.
Et l'arrêt brutal de la restauration. Ce matin, je n'ai pas de car à
prendre. La trottinette va pouvoir se reposer sur ses deux roues un
certain temps. Je me lève à 5H de fait, pour prendre mon poste à
5H45. Dans mon salon. J'appréhendais le travail à domicile. Or c'est
comme si j'avais toujours produit depuis chez moi. Il faut dire que
mon espace de travail est dévolu à mes blogs, il est propice à la
création intellectuelle. Michaël m'a posé un traitement de son, un
micro et une petite table de mixage. Les connexions sont établies
avec la radio. Ma première journée de télétravail en 35 ans de
métier se révélera productive et sans accroc. En fin de matinée,
un dernier salut à maman avant le confinement. A 11H59, je suis sur
le point de franchir ma porte d'entrée. Désormais il est interdit
de sortir sans motif dûment justifié.
Jeudi 19
mars. Saint Joseph ne sera pas célébré comme il le faudrait cette
année.
Nouvelle expérience pour moi : comme les locales de RTL2 sont mises en sourdine, je suis appelé comme joker de Cerise FM, une radio musicale haut-rhinoise. J'y avais déjà assuré chroniques et interviews. Un chapelet de bulletins de 6H30 à 12H30. Le travail de reporter reprend ses droits. Je me rends chez Esteban Domitin, boulanger Banette° qui m'attend rayonnant sous le soleil.
Nouvelle expérience pour moi : comme les locales de RTL2 sont mises en sourdine, je suis appelé comme joker de Cerise FM, une radio musicale haut-rhinoise. J'y avais déjà assuré chroniques et interviews. Un chapelet de bulletins de 6H30 à 12H30. Le travail de reporter reprend ses droits. Je me rends chez Esteban Domitin, boulanger Banette° qui m'attend rayonnant sous le soleil.
14H. Je
monte en ville encore. Devant l'hôtel de ville m'attend la police
municipale. C'est à la place du mis en cause que je me fais
véhiculer sur deux points de contrôle, histoire de voir comment les
automobilistes et piétons appliquent les consignes gouvernementales.
Vendredi
20 mars. C'est le printemps. On l'oublierait presque. Ma sortie du
jour se limite à une opération poubelles. L'attestation dérogatoire
de déplacement est nécessaire, même pour quarante pas. Je me
trouve en mouvement sur l'espace public.
Samedi 21
mars. Jour des courses. Retour chez le boulanger. Je croise mon
ancien pompiste, qui ne change pas malgré ses huit décennies au
compteur mais qui ne dira rien de plus que mon nom. Tiens, voilà une
autre vieille connaissance, issue de la banque. Un autre vieux
monsieur qui se masque le visage et diffuse un arôme de laurier. Il
est moins bavard désormais et fuit le corona. Heureusement le
personnel de la boulangerie est souriant malgré la déprime
ambiante. Chez mon boucher de proximité, c'est encore plus calme. Et
le tabac-presse d'en face est fermé depuis mardi.
Dimanche 22 mars. 10H. Les cloches de Notre-Dame sonnent. Je ne sais pas quand a eu lieu la dernière messe dans l'église de mon enfance. Les cultes, on oublie pour le moment. Mais ça fait longtemps que mes contemporains ont oublié Dieu. Le chien de la voisine chiale.
Dimanche 22 mars. 10H. Les cloches de Notre-Dame sonnent. Je ne sais pas quand a eu lieu la dernière messe dans l'église de mon enfance. Les cultes, on oublie pour le moment. Mais ça fait longtemps que mes contemporains ont oublié Dieu. Le chien de la voisine chiale.
Ce 4e
dimanche de Carême est pourtant celui de la réjouissance. Le
printemps réveille la nature, la lumière pascale se lèvera
bientôt. Réjouissons-nous des guérisons, rappelle Mathieu, curé
des paroisses de l'Eau Vive, qui propose un office en Facebook live
depuis son église de Village-Neuf. Encore une expérience pour moi,
privé de messe in situ. Près de 330 vues en moyenne pour cette
première. Mulhouse instaure le couvre-feu à 21H.
Lundi 23
mars. 7E jour de confinement. Je me lève à 4H45. Interview
téléphonique du chef deux étoiles Olivier Nasti qui a fermé son
ensemble de luxe. Il en profite pour réaliser des recettes de CAP.
Mon patron prend des nouvelles.
Ce soir, Edouard Philippe va annoncer que le confinement durera quelques semaines.
Quand « beaucoup de nos concitoyens aimeraient retrouver le temps d'avant ».
Ce soir, Edouard Philippe va annoncer que le confinement durera quelques semaines.
Quand « beaucoup de nos concitoyens aimeraient retrouver le temps d'avant ».
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