17 novembre 2018

GILETS JAUNES A ALTKIRCH : LA COLERE DE LA CAMPAGNE






17 novembre. Il y a tout juste cent ans, les troupes françaises entraient dans Mulhouse. Aujourd'hui est aussi une date historique, avec le commencement officiel des mouvements des Gilets jaunes.
Altkirch sera un haut lieu de l'action, capitale de ce Sundgau toujours rural et de plus en plus éloigné de l'Etat qui réduit sans cesse ses services publics dans un territoire de 70.000 habitants déjà privé d'industrie. La sous-préfecture est de nouveau vacante, l'hôpital de proximité régulièrement menacé d'une amputation, de petites gares ne sont plus qu'un lointain souvenir, Orange a coupé le fil...




C'est un samedi hivernal qui démarre. Le soleil ne percera que cet après-midi et le mercure est à peine au-dessus de zéro quand je me lance dans la chasse à l'information dans cette ville qui m'a vu naître un jour de novembre aussi. La connaissance du terrain est un avantage qui me permet d'éviter de me retrouver happé dans un barrage. Direction Carspach pour atteindre le carrefour du Kilianstollen par la petite route. Il est environ 10H30, une centaine de manifestants sont positionnés dans le rond-point, qui organisent un barrage filtrant. Je compte encore deux gendarmes. Des chiens aussi sont couverts d'un vêtement de haute visibilité. Avant de gagner ce site stratégique entre Mulhouse et Belfort, j'ai croisé un petit convoi au train d'escargot.








J'échange avec Sylvia, qui a poursuivi sa carrière de santé en Suisse après un passage à Saint-Morand où les personnels étaient déjà sous pression il y a trente ans, me raconte-t-elle. De l'autre côté de la frontière, "elle est considérée et a du matériel pour travailler".
Elle peste contre les conditions de vie et de travail en EHPAD, citant ce vieil agriculteur qui y finit ses jours  après avoir économisé pour financer un séjour dont personne ne voudrait.

Deuxième étape à l'autre bout de la ville, en direction de Mulhouse.
Le rond-point du centre Leclerc, porte aussi vers Saint-Louis. Les Gilets jaunes sont moins nombreux qu'avant, mais gênent considérablement l'hypermarché dont le parking est bien vide pour un samedi. Les clients porteurs du signe de contestation ne sont pas les bienvenus semble-t-il. Echange avec des renforts venus spontanément et Sophie, une militante du ras-le-bol. Un gendarme à bonnet prévient du passage d'une ambulance en provenance de Dannemarie.





Il me reste un troisième point à couvrir. Le rond-point du cimetière, porte vers Thann et l'autoroute. Les tracteurs sont disposés de façon à permettre le passage des véhicules. Une file est à l'arrêt à l'entrée de ville, derrière un ensemble agricole. Un air de Noël est détourné pour interpeller le chef de l'Etat. Des klaxons. Des camions entrent dans la manifestation. A midi, les organisateurs appellent à respecter une minute de silence à la mémoire de la policière qui a mis fin à ses jours récemment, sa vie étant devenue insupportable semble-t-il. Dans ces rassemblements, j'ai écouté des anonymes pour qui les grands décideurs de ce pays ont dépassé les bornes. 
"Les gens ne veulent pas de chèque ! Ils veulent vivre de leur travail", m'a dit l'un d'eux. L'apprenti ouvrier agricole s'interroge lui sur son emploi demain. La trésorerie des entreprises n'avait pas besoin de flambée du gazole, quand on peine déjà à nourrir ses vaches. La journée d'action n'a pas fait les affaires non plus de mon boucher de proximité. En tapant sur les nerfs de nombreux compatriotes, les Gilets jaunes ont eux aussi tapé au portefeuille du premier ponctionneur de France. En martelant qu'ils revendiquaient pour l'ensemble des Français. 
Le syndicalisme de l'ancien régime paraît dépassé et le maître des horloges n'a peut-être pas vu l'heure. 






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire