17 juin 2025

LE PATRIMOINE SNCF SUR LE PONT





Train rime avec incertain. A Mulhouse, "L'Aventure du Rail" est arrivée en avance à son terminus le 15 juin en raison de l'alerte aux orages. Deux représentations perdues sur six. C'était pourtant l'événement de l'année rue Alfred de Glehn. 



Les spectacles de plein air sont à la merci du ciel. Nous avons eu l'honneur d'inaugurer la création vendredi vers 18H10 alors que Mulhouse transpirait sous le soleil de juin. La chaleur explique peut-être les gradins pas tout à fait remplis et pour le volet "lumière" de "L'Aventure du Rail", nous aurons apprécié celle de ce jour ensoleillé. Nous n'aurons pas manqué une miette cependant de l'histoire. 

En 1971, Mulhouse découvrait le Musée français du chemin de fer. En 2005 naissait la Cité du Train. Pour la traction, un non cheminot mais un capitaine qui allait durablement insuffler une nouvelle énergie à la plus grande collection ferroviaire d'Europe, Sylvain Vernerey. Un manager qui sait bouger les matériels et les hommes. Devenu ferrovipathe au fil du temps, il rêvait d'un grand coup pour son environnement. L'an dernier, la route de Sylvain croisa celle d'un visiteur, Julien Clugery. Ainsi démarra le projet de "L'Aventure du Rail". Une production grandiose pour marquer les 20 ans de la Cité du Train. Une rétrospective théâtralisée du chemin de fer. Avec les outils actuels comme les murs d'images, l'interprétation humaine et surtout des figurants massifs, 5 matériels représentatifs du patrimoine SNCF. 




Dans "L'Aventure du Rail", la scène valorise un équipement de première importance mais méconnu ou ignoré du grand public habituel, le pont tournant. Cet outil porte une partie du spectacle, car sans lui, impossible de faire entrer ou sortir les stars d'acier, de plus  dans une synchronisation remarquable. Tour à tour se succèdent la vapeur Crampton de 1852, l'autorail Bugatti, la BB 9004 du record du monde de vitesse en 1955, une voiture du TEE (le grand standing entre Paris et Amsterdam dans les Trente Glorieuses) et la locomotive TGV du record de 2007 à près de 575 km/h. Pour (re)donner vie à ces matériels roulants, Julien Clugery a posé des personnages en rapport avec l'époque. 150 ans d'histoire ferroviaire vont défiler en 1H15 dans un voyage orchestré par un animateur, Chronos, le guide du temps remonté. Yannick Vabre campe un maître des horloges qui n'est pas avare de jeux de mots en rapport avec le train; il s'agite comme un sémaphore, lunettes de conducteur de loco à vapeur du plus bel effet pour le chauffeur d'arène qu'il est d'abord. Or le départ du spectacle est aussi ennuyeux qu'une rame qui ne s'ébranle pas à l'heure, dans un tintamarre et une collision d'images. Mais bientôt, les autres comédiens entrent sur le plateau. Place au théâtre. L'écriture propose une histoire d'amour comme fil conducteur. Un homme, Marcel, une femme, Blanche. Et un tiers. Les amants échangent au plus près du matériel tiré ou poussé par un locotracteur.
Sylvain Vernerey, tout directeur général qu'il est, sait conduire l' Y 7108 bariolé, tandis que passe de temps à autre un tramway jaune ou un TER, le musée jouxtant la ligne Mulhouse - Strasbourg.




Les comédiens sont convaincants qui reproduisent l'Ettore Bugatti autoritaire  qu'on appelait le "Patron" et s'amusent du conducteur de TGV qui tient la correspondance entre ses mains. Chaque tableau est consacré à un élément roulant et le metteur en scène a eu la bonne idée de compléter son propos de musique en appelant des danseuses. Du cabaret parisien aux années 2000 en passant par les seventies. Du rythme, de la couleur, de la joie. On nous avait promis un spectacle plein d'humour, pour toute la famille, pour le plaisir des yeux, sans temps mort. Passionné de chemin de fer, j'ai eu les yeux davantage rivés sur les rivets des matériels que sur les froufrous des demoiselles de cancan. Mais cette histoire qui tient les rails m'a touché. Parce qu'en vieux routier du compartiment, je sais combien le train est promesse d'aventure et de belles rencontres.












6 juin 2025

42.000 SLOWUPPERS EN ALSACE CENTRALE

slowUp Alsace 2025







 

Je viens de boucler mon 11e slowUp Alsace. Je les ai tous faits. Et terminés. Seul comme accompagné. Le dernier en compagnie de Parinda mon épouse, qui n'a pas été à la fête faute d'entraînement alors que je l'ai conduite sur tout le tracé. Mais elle a rallié l'arrivée.
En arrivant à Bergheim, un des villages d'accueil et toujours mon départ, car le plus au sud du parcours, je m'attendais à une forte participation. Là où à peine une dizaine de voitures stationnaient l'an dernier, le grand parking était plein à 10H30. Le slowUp, ce sont des rencontres au fil des chemins. Un jeune homme m'annonça qu'il allait tenter de courir les 38 km, mais comme sa nuit fut courte, il n'en était pas sûr. Les 40, avec la liaison vers le circuit, j'étais quasiment assuré de les accomplir. Avec l'expérience et l'endurance, la volonté faisant le reste. Parinda à vélo et moi à trottinette flambant neuve sommes ainsi partis de Bergheim à 10H50. 




Cette année, nous étions sous la menace d'un temps instable. En 2024 et en solitaire, je partis sous la pluie. Fort heureusement, la plus grande manifestation touristique d'Alsace aura été épargnée par les intempéries. Sous un ciel tantôt clément tantôt lourd nous roulions. La chaleur se manifestait parfois. Heureusement, les généreux  producteurs de boissons désaltérantes n'ont pas fait défaut. Ils avaient anticipé.  Le slowUp Alsace célébrant la Route des Vins, on ne risque pas de mourir de soif même si la modération s'impose, particulièrement quand la pente descend fortement.




C'est incontestable. Le slowUp, c'est d'abord le vélo. De plus en plus de VAE, mais des cyclistes aguerris poussent leur machine quand l'allure est censée être douce surtout dans un flot ininterrompu de pratiquants. On croise aussi des adolescents qui font le kéké. Maintenant je n'ai vu de trottinette musculaire que la mienne, quelques unes électriques, une  gyroroue, des vélos à remorque , une voiture à pédales, un monocycle, une paire de skis à roulettes et surtout ce Badois à rollers, lui aussi engagé sur le grand parcours.  Sportifs réguliers, sportifs du dimanche, faux sportifs, c'est cela aussi la grande famille des slowuppers





Et ces places festives qui rendent la randonnée joyeuse. Nous nous sommes évidemment arrêtés à Scherwiller, toujours très vivante. Pascal Roelly est inratable, qui fut le premier animateur du slowUp. Dommage cependant de devoir acheter son hot dog à un stand, la boisson à un autre et de renoncer aux frites au troisième quand l'appareil de cuisson dysfonctionne.  Mais la cité des lavandières est bien dotée en sanitaires. 



A Dambach-la-Ville, nous avions atteint la pointe nord du tracé. Il restait encore beaucoup de route. Cette année, les pauses ont été plus fréquentes  pour  préserver Parinda et mieux gérer l'effort. J'ai gravi les pentes sans marcher et au retour à Bergheim, je n'ai pour une fois pas ressenti de fatigue excessive malgré la lourdeur du temps. 
Cela méritait bien quelques bulles pour mon accompagnatrice qui s'est juré de ne plus me suivre dans une telle aventure. Mais la vérité d'un jour de juin ne sera peut-être pas celle de demain. 




L'ILL A COUPER LE SOUFFLE

Jusqu'au 29 juin à Mulhouse






Le Vosgien  Damien Fontaine et son armada de l'illusion numérique font couler une Ill mystérieuse aux Bains municipaux. "Le Souffle de l'Ill" est un spectacle kaléiodoscopique puissant.




Beaucoup de Mulhousiens ont une histoire avec les Bains municipaux de la rue Curie en face de la mairie. Energivores, ceux-ci ont été fermés le 3 janvier 2023. On ne sent plus le charbon de Colombie. On ne fréquente plus les bains romains. On ne se détend plus dans ce qui a été la piscine de centre-ville. On n'apprend plus  la natation. Le 800e anniversaire des remparts de Mulhouse heureusement n'a pu faire l'impasse sur ce haut lieu de l'histoire locale. m2A et la Ville avaient une bonne raison de réveiller la vieille dame, du moins provisoirement. Car nul ne sait quelle orientation donneront l'EPCI et la collectivité quand les Bains auront rendu le dernier Souffle de l'Ill.

 La communauté d'agglomération et Mulhouse voulaient rassurer qu'elles n'oubliaient pas la piscine désaffectée. L'an dernier, pour le 80e anniversaire de la Libération, le metteur en scène multimédia Damien Fontaine avait remonté le temps dans Terra Alsatia et embarqué dans son voyage inédit 24.000 spectateurs à l'église St-Etienne. Il propose aujourd'hui une  odyssée fantasmagorique dans les entrailles de l'Ill dans  d'anciens bains municipaux.





Quand en avril la commande publique a présenté le projet, les Bains n'étaient encore qu'une coquille vide avec leur bassin asséché. On promettait alors de le remettre en eau pour le spectacle. C'est surtout  un "son et lumière unique en Europe" qu'on a vendu. Les élus et décideurs de l'agglomération et la presse ont pu s'immerger les premiers dans cette création qui fait appel à un foisonnement technologique avant-gardiste. Le Mulhousien TSE de Jérôme Bigeard met tout son savoir-faire dans la transformation par l'image et l'animation  de la piscine quand Aquatique Show, autre pointure mais de notoriété mondiale, fait parler l'eau. Le spectacle immersif est total effectivement, que le public suit au casque. Virtuel et réel se confondent dans un magma de couleurs, fresques, graphismes, illusions, hologrammes. La compagnie de danse aérienne Motus Modules fait le reste. Mais la performance est aussi musicale. Depuis le balcon, André Adjiba, timbalier et percussionniste de l'ONM, fait tinter ou tonner son arsenal, imprimant le rythme à la manière de l'hortator des galères romaines. Et les amateurs de son pop-rock sont gâtés.






Si le show est grandiose et millimétré, l'histoire est alambiquée. Un petit garçon et un senior  pleurent la fermeture des Bains municipaux. Damien Fontaine s'inspire du Petit Prince mais c'est l'enfant qui dessine. Comme il s'agit de l'histoire de Mulhouse, le moulin originel s'impose. Il est tenu par un meunier dans la détresse auquel un baron auquel Hans von Trotha n'a rien à envier promet la prospérité  moyennant ce qu'il a de précieux. Sa fille Wendélina. Quand elle est en âge d'être prise, ce diable de Klingenberg vient réclamer son dû. C'est là que commence le conte avec le chevalier Elias, peu téméraire, la jeune fille volée et le baron , plus Satan que sang bleu. Mais le petit garçon et le vieux monsieur vont aider Elias à retrouver la belle, en suivant l'Ill, plutôt en y plongeant. La paisible rivière que Mulhouse a déviée devient mer ou océan. On y croise le requin baleine et bien d'autres squales. Dans leur périple 20.000 lieues sous les mers, les héros ont emmené des figures historiques mulhousiennes comme Nicolas Koechlin et William Wyler. Pas de temps mort, bien au contraire et des ambiances contrastées entre les flammes éternelles et la paix des récifs coralliens. Et puis, la magie des acteurs habillés par Marie-Jo Gebel. Ils marchent sur l'eau quand ils ne s'en élèvent pas. Le spectateur, assis sur sa chaise comme sur le pont d'un  paquebot,  va faire un rêve éveillé. Il en aura oublié la nostalgie des lieux . 





Photos m2A et Ville de Mulhouse 

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