L’été 2013.
Le plus beau depuis longtemps sans doute. Le plus cruel aussi. Rungnapha t’a
emmenée vers ma route, douce assembleuse de cœurs en peine. Tu allais
probablement quitter la France ; j’ai accepté de te connaître avant cette
échéance que tu ne souhaitais pas. C’est dans le vieux Colmar, curieusement à
proximité de l’arbre à directions internationales près de la mairie, que nous
nous sommes rencontrés. Tu étais marquée par l’épreuve d’un divorce que tu
n’avais pas vu venir. Tu allais entrer dans une autre vie, la mienne. C’était
le mois de juin, les eaux jaillissaient au Champ-de-Mars. Dans la plaine
colmarienne où tu avais trouvé refuge, le maïs poussait. C’est au bord du Rhin
que j’ai pris ta main. J’avais dix-sept ans de nouveau. J’étais amoureux.
Mais
l’administration ne connaît pas l’amour. En juillet, la République ordonna ton
retour au royaume. Nous avions moins d’un mois pour organiser ce terrible
départ. Il n’y avait pas d’échappatoire. Nous avons beaucoup pleuré cet été -
là. Le 18 août, quelques heures avant ton envol, je te fis la promesse de
t’épouser un jour. Le ciel pleurait aussi ce dimanche soir.
Les mois ont
passé. Tu as retrouvé tes proches dans le nord de la Thaïlande, avant de faire
un nouveau voyage vers les paradis à touristes, pour gagner ta vie. Nous avons
fait l’expérience des demandes de visa rejetées, mais moyennant arrangement et
avec le concours de nos parlementaires, tu as pu revenir en juin 2014. Dix mois
sans te serrer dans mes bras. Trois pour une visite dans ce pays que tu aimes
peut-être plus que moi. Puis tu es repartie le 8 septembre, le jour de la
nativité de Marie, celui qui marque la fin du séjour des hirondelles dans la
mémoire collective.
Il m’aura
fallu attendre l’automne 2015 pour me perdre de nouveau dans tes beaux cheveux
noirs. Jamais je n’aurai été si enthousiaste à l’approche de la rentrée. Un
trimestre supplémentaire de bonheur dans notre vie à deux en pointillés. Le
privilège de fêter ensemble mes cinquante printemps. Et, satisfaisant à ta
requête, je t’ai montré Paris, la ville-lumière qui enchante tes compatriotes.
Quelques jours plus tard, je sanglotais dans l’aérogare de Zurich devant le
sapin d’or quand tu disparus derrière les portes vers l’Asie. Troisième Noël
sans toi.
2016 vint. L’année
du grand périple. Nous décidâmes que cette fois, ce serait mon tour d’aller à
ta rencontre. Comme un voyage de noces au Pays du Sourire. Dix jours dans un
autre monde. Des trajets au long cours à travers cette Thaïlande que j’aimais
sans la connaître. La plénitude au bord de la mer, les arômes de la rue, la
moiteur de la chambre, ton village familial ou le farang est une curiosité, les regards rieurs des enfants. Et l’inévitable
séparation à Suvarnabhumi. Avec cette récurrente angoisse de ne jamais plus te
revoir…
2017. Les barrières tombant les unes après les autres, le printemps s’annonce sous d’heureux présages. Ton retour pour officialiser notre union devant Marianne. Moins de quatre ans après la promesse de Hirtzbach, nous sommes sur le point de nous marier, par je ne sais quel miracle tant tout paraissait compromis pendant ces quelques semaines qui t’avaient été accordées à cette fin. Une fois encore, des personnes ad hoc et bienveillantes ont aplani notre difficile route. J’ai obtenu que Jean-Luc Reitzer, mon maire depuis toujours, soit l’officier d’état civil pour ce mariage inhabituel. Dans peu de temps, l’élu devra rendre son écharpe municipale. La cérémonie, dans l’intimité d’une assistance minimale, est pleine d’émotion. L’hôtel de ville étant en travaux, nous sommes unis de plus dans la salle d’audience de l’ancien tribunal d’instance. La préfecture, la police aux frontières, la justice. Nous aurons connu tous les services de cet Etat qui sépare puis unit.
La lune de miel sera pour plus tard, car sitôt épouse Kury, tu dois rentrer pour revenir. Comprenne qui pourra.
Août reviendra
aussi. Mes vacances sont finies quand enfin tu apparais dans la file nocturne
de l’EuroAirport. Il me revient cette soirée de 2013 où nous séparâmes. C’est
dans cette même plateforme que tu m’es rendue pour un séjour d’un an au moins.
28 avril
2018. Voilà un an que tu es mon épouse. Cinq années de bonheur malmené par des
tracasseries administratives. Mais cinq années d’amour et de tendresse. Je rends
grâce à Dieu de ta présence dans ma vie, toi qui es une bénédiction et qui
ensoleille mes jours.
Heureuses
noces de coton mon amour !
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