4 novembre 2016

UNE NUIT AU PHARE DE FATOUVILLE

Aller au phare de Fatouville, c'est comme accomplir un pèlerinage. La démarche doit être mûrement réfléchie. Voilà un phare de terre ferme, certes dans l'estuaire de la Seine, mais niché dans les bocages entre Honfleur et Pont-Audemer. Une construction de trente-deux mètres de haut dont la vigie donne d'apercevoir Le Havre et les paisibles parcelles vertes de Normandie. Une tour hexagonale toisant un corps de ferme en brique traditionnelle jouxtant l'habitation du gardien, celle-ci  réhabilitée en chambres d'hôtes.

Anne, une boulotte fille du pays, tient l'adresse insolite, ses petons serrés dans ses tennis couleur granny smith. Ses jambes lui font un peu mal, mais la maîtresse des lieux se fait un devoir et une fierté d'ouvrir pour ses convives d'une nuitée l'ascension des 163 marches du phare acquis à grands frais par son arrière-grand-père en 1923.

Au rez-de-chaussée de la construction, la grande table du petit déjeuner occupe l'essentiel de l'espace sous une vitre laissant paraître les parois interminables du lieu. Le premier repas journalier de l'hôte est copieux. Il s'articulera autour des confitures maison, des pains aux céréales aux saveurs oubliées et peut-être d'un jus d'orange discount. Une affiche à l'abri du temps rappelle la cession de ces murs au siècle dernier.

Quand Anne se décide enfin à accompagner ses visiteurs là-haut, vers dix heures, elle libère notre insatiable curiosité. Le phare de Fatouville ne paie pas de mine de prime abord. Au premier niveau, une étonnante et poussiéreuse collection de jouets anciens, des poupées surtout, s'est endormie. Les étages supérieurs ne sont guère plus étincelants. C'est bien un monument désaffecté que nous pénétrons, aux teintes fatiguées, aux boiseries ternies, aux métaux oxydés. Et à la lanterne fissurée.

Mais dans le matin calme de l'Eure, cette montée bénéfique nous montre la voie de la Seine qu'enjambe l'altier pont de Normandie. Tandis qu'en bas, à nos pieds, le vaisseau gris nous attend.
Il faut, sans délai supplémentaire, mettre le cap à l'est.







24 juillet 2008

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire