11 août 2020

NUS AU SOLEIL



Tandis que la France suffoque dans la chaleur d'août et que nous cherchons un peu de fraîcheur, Antoine savoure l'instant dans son éden du côté d'Ensisheim. Depuis deux ans, ce retraité conduit le Club du Soleil, un des rares campings naturistes de la région. A 20 km à l'ouest de Strasbourg, on connaît le Centre gymnique d'Alsace, à Wasselonne.
Mais revenons dans la région mulhousienne où quelque 200 membres composent la grande famille du Soleil, créée voilà un demi-siècle.
Pour la trouver, il faut emprunter le chemin de l'Eiblen. Le camping vit à l'écart de la ville et bien sûr à l'abri des regards.

Antoine a vécu sa première expérience naturiste en Ardèche dans les années 80. Il pratique occasionnellement, confesse-t-il. Le naturisme est une philosophie, rappelle la fédération française. Des millions de Français y souscrivent. Certains la partagent dans un milieu associatif comme ici à Réguisheim. La doyenne du Soleil s'y adonne depuis quarante ans. Aline, une trentenaire, a rejoint le club voilà quatre ans. A l'invitation d'une amie qui y avait ses quartiers d'été. Elle a été séduite. Pour le reste, elle ne se revendique pas militante de la nudité, c'est juste le bonheur d'être au plus près de la nature.

                                                       
 photo J


Devant le camping, un homme considère le portail fermé. Cet adulte résidant dans le secteur voulait s'informer sur les conditions d'accès. Il faut compter une centaine d'euros à l'année, incluant la licence FFN. Le curieux repassera, car cette année, le Soleil ne verra pas les touristes. L'an dernier, ils étaient nombreux en haute saison, se souvient Antoine. Ce matin, c'est le grand calme. La crise sanitaire a poussé l'association a garder ses murs clos, accessibles aux seuls membres. Une année blanche ici aussi. Pas d'accent hollandais sur la pelouse, des emplacements déserts. Pour ces adeptes du havre de paix, 2020 sera encore plus tranquille dans l'écrin verdoyant. Ça n'empêche pas les rendez-vous festifs comme la soirée cochon à la broche. 



En juillet, le Soleil a participé toutefois à la journée sans maillot, immersion dans le naturisme qui a attiré une trentaine de visiteurs, dont une grande partie conquise. La journée découverte de mai elle a été abandonnée; elle ne rapportait rien de l'avis du comité.  
Du reste, le club ne cherche pas à recruter massivement. Pas question de devenir un terrain trop fréquenté. Vivons heureux, vivons (presque) cachés. Quant au cinquantième anniversaire de l'association, ça attendra 2021. Le soleil se lève toujours sur les corps libres de ce coin de Réguisheim. 





Photos CSM 



L'Ill à proximité du site  (photo PK)

1 août 2020

LES DENTELLIERS DES BOIS

#jouetsboisliezey

Benoît Claude



Entre Gérardmer et Le Tholy, quittez la D417 pour Liézey. Ce petit village niché sur un plateau forestier est devenu une pépinière d'artisans et producteurs. Il faut serpenter un moment avant de trouver le monde de Benoît Claude, fabricant de jouets en bois.


A mon arrivée, l'atelier est inanimé. La seule présence est animale. Des chèvres assurent l'accueil. Il faut appeler Benoît, qui doit être derrière dans la clairière.  L'endroit respire la sérénité. Les consignes sanitaires affichées sur le bâtiment nous renvoient à 2020. Même ici ce maudit virus se rappelle à notre souvenir. Ben apparaît avec un grand sourire. Un fabricant de jouets ne peut pas être sinistre.

A côté de l'atelier et de la boutique, une ferme vosgienne du XVIIIe. La guerre en avait fait une ruine. Dans les années 1980, Jean-Louis Claude, le père de Ben, cherchait un lieu où se poser et travailler. Il est tombé sur le chemin du Pré d'Anis et y a construit sa nouvelle vie. Quand on visite la petite entreprise, on ne coupe pas à la projection vidéo. Des reportages télé surannés  racontent le quotidien et le jouet en bois de Jean-Louis.

Ben est né ici et comme son papa a eu d'autres métiers. Son grand-père avait été menuisier. Depuis une quinzaine d'années, il est dans l'activité familiale. Jean-Louis s'était aussi spécialisé dans le chalet et pendant de longues années écoulait sa production de petites pièces sur les marchés, dont celui de Colmar pour Noël. Ben déplore que ces manifestations aient perdu leur côté humain. "On n'est pas des vendeurs" me glisse-t-il. Non, dans ce coin paisible, on est plutôt dans le partage. Jean-Louis est conteur et musicien. Il fait vivre en ses murs le trou de l'enfer, la fée polybotte, le trésor du sagard, Jean Meyon en patois et bien d'autres histoires qui ne laissent pas de bois.
Je n'aurai pas le plaisir de voir le conteur de Liézey mais Ben a de quoi dire aussi, lui qui anime des ateliers en centre aéré et en milieu scolaire avec sa compagne Mel. Entre-temps, une chèvre vient de s'immiscer entre les machines. 



Ici, on conçoit et réalise l'objet bois, du petit train au porte-serviette en passant par les lettres et les  suspensions décoratives. On traverse les époques, avec les images d'un temps lointain et les outils d'hier, quand tournait le haut-fer.
Ben, comme son père, est chantourneur, il tire de l'arbre des objets façonnés voire ciselés, dans la simplicité. Habit de bois brut, ni traitement ni peinture. Si le savoir-faire est traditionnel, l'artisan apporte la technologie actuelle à la découpe avec le laser. Pour la matière première, toutes les essences sont utilisables. Sapin, frêne et cerisier notamment. La plupart des arbres sont prélevés sur place. Le séchage est primordial, compter un an par centimètre d'épaisseur. 





Dans sa forêt, Ben est heureux parmi ses compagnons ligneux et à pattes. "Je peux choisir comment organiser ma journée" confie-t-il. Parfois, il vient du monde pour une visite commentée. Ou pour une découverte. A l'heure des circuits courts et des produits sains, le jouet en bois des Vosges reste une valeur sûre. Solide, chaleureuse, accessible.



www.jouetsboisliezey.fr 

Benoît et Jean-Louis Claude
3, Chemin du Pré d'Anis
88400 Liézey
Du lundi au vendredi, week-end et jours fériés sur RDV.


Visiter aussi la Maison de l'Artisanat 

Voir encore sur ce blog "Auberge de Liézey : le terroir à l'aise".