15 avril 2022

CROIX A LA CROISEE DES CHEMINS A ZIMMERSHEIM

 


Croix du Clauser 


Après deux années d'interruption, la Pastorale du tourisme et des loisirs de la communauté de paroisses de la Hardt aux Collines a emmené ce matin près d'une cinquantaine de personnes dans une randonnée autour des calvaires de la commune de Zimmersheim. Ce 7e circuit avait été prévu pour 2020.  Pour le conduire, un spécialiste du patrimoine, Christian Coulon, par ailleurs Greeter  à l'office de tourisme de Mulhouse. 


Il suffit de s'intéresser aux monuments pour les sortir de l'oubli,  raconte le guide du jour, qui a pris le soin d'emporter de vieux documents et de s'inspirer d'un regretté chargé d'âmes, le docte curé Ackerer.  Le départ a lieu devant l'église de l'Assomption, qui a une particularité. Une boîte à lettres près de l'entrée.

Un premier arrêt devant l'ancien presbytère, où le feu s'était déclaré en mars. Un rappel à un éminent architecte, Pierre Racine, le père du château de Delémont. Puis la première croix, rue de Dietwiller. De béton, elle repose sur un socle daté de 1877. Elle se situe à la sortie du village, au-dessus de la route, sur une propriété privée. Touché par un bombardement en 1944, déplacé en 1972, ce monument avait été érigé à la mémoire d'une femme décédée en 1835. Mais lors de son enlèvement, on avait trouvé une autre croix, qui veille aujourd'hui sur le cimetière. Celle-ci mentionne 1750. La pièce originelle était peinte. Il s'agit d'une croix à panneau rond avec la scène du Calvaire.

La croix de la rue de Dietwiller  est liée à celle du chemin de Habsheim, plus loin. La deuxième a été dédiée à un agriculteur écrasé par un tonneau. Les personnes liées à ces calvaires étaient époux. 



Chemin faisant, on se souvient des processions des rogations, prières appelant à la bénédiction des biens de la terre, les trois jours précédant l'Ascension. Jusqu'aux années 50, les cortèges passaient par les croix. Il arrivait que deux villages se croisaient, les hommes indisciplinés et goguenards fermant la marche. 



A l'intersection du Herrenweg, la croix aux trois sapins. Ici, Zimmersheim fait un bond dans le néolithique et la période gallo-romaine. Pour le promeneur par beau temps, c'est la possibilité de voir les Alpes suisses. Nous sommes au voisinage des plants d'asperges. Jadis, c'étaient les chènevières (champs de chanvre) et les vignes qui produisaient le Sunnagletzer, les moulins à huile et à gypse, les tuileries. 


Croix du Ristelweg


Après trois heures de circuit, les marcheurs du Vendredi saint auront vu une demi-douzaine de croix et écouté les explications de l'historien attaché à son patrimoine. Au passage, Christian Coulon fera remarquer des maisons alsaciennes et leurs curiosités.




Chaque étape aura été enrichie d'une courte lecture en rapport avec la crucifixion, dont un texte de Victor Hugo.
"Vous qui pleurez, venez à ce Dieu, car il pleure" (Les Contemplations). 
Un marcheur, arborant un badge bleu et jaune, a pris la parole à l'issue de la rencontre, pour parler brièvement de la croix mondiale de ce début d'année.
"Mon Vendredi saint, c'est l'Ukraine!" 



Voir aussi sur ce blog

Chemins de croix à Obermorschwiller 
Vendredi saint sur le ban de Steinbrunn-le-Haut 





31 mars 2022

ZOMB'IN NEUF-BRISACH



Un samedi soir de mars. Le printemps commence dans une douceur ajoutée à un ciel parfaitement dégagé. Je roule vers Neuf-Brisach, la petite ville chère à mon cœur amoureux. 
La cité en étoile s'apprête au repos vespéral quand je m'arrête aux abords de la place d'armes. Derrière moi, la rassurante église royale Saint-Louis. Je ne sais où aller, alors j'emboîte le pas à des inconnus qui vont manifestement là où nous sommes attendus.


La société Argémie et ses partenaires nous ont préparé une sortie de derrière les remparts. Zomb'in the dark bivouaque dans la forteresse Vauban pour la première fois. Depuis quelques années, Mathieu Gouyen et Paul Chiozzotto font des courses d'orientation flippantes leur business. Ils cherchaient un terrain de jeu en Alsace. Les murs séculaires de la ville fortifiée au bord du Rhin les attendaient. C'est dans ce cadre 1700 que débute la saison de la société de Villeurbanne. 



Il faut passer par le musée Vauban, dont l'entrée est  gardée par un grand gaillard avenant. Le jour décline et dès le tunnel franchi, l'air est plus frais. La tente des secouristes est en montage, les équipes arrivent. Je me présente seul, sous mon pseudo de "guerre" féminin. La première vague de départs est prévue à 19H30. Il était recommandé de se munir d'une lampe frontale et éventuellement d'une boussole. Dans mon groupe un ancien militaire aguerri à l'orientation, des couples, des Savoyards fraîchement établis à Neuf-Brisach, des potes sportifs...Quand vient notre heure, nous marchons dans la nuit vers le début de l'aventure. Une jeune femme assure le briefing et nous donne une carte. C'est l'étoile de Vauban, dans laquelle ont été déposées ou dissimulées des balises, des sacs orange numérotés qui portent le nom d'un personnage. Malheureusement, l'un de ces articles sera bientôt subtilisé. Chaque repérage rapporte des points. Plusieurs balises ne figurent pas sur le plan qui valent donc davantage.




Nous ne sommes pas nombreux, peut-être une vingtaine pour ce premier envoi, chaque équipe allant son chemin. Etre à deux ou à trois multiplie les chances de trouver et facilite l'orientation. Nous avons une heure et demie pour coucher le maximum de mots sur la feuille de jeu. Nous portons une ceinture avec deux langues symbolisant nos vies. Il s'agit de ne pas se les faire arracher. Très vite, la fraîcheur s'oublie car il faut souvent courir pour échapper aux hôtes des fossés. Les zombies. Combien sont-ils? Au moins une vingtaine, éparpillés, tapis dans l'obscurité, assis contre une paroi, à l'affut derrière un pilier, à proximité des sacs évidemment. Je m'attendais à des pérégrinations pleines de frissons. Je m'étais préparé mentalement à la confrontation. Mais dans la nuit des remparts, ma petite lampe de poche n'éclaire pas l'espace. J'ai bien choisi cet accessoire qui me permet de me déplacer sans me faire remarquer comme je l'éteins souvent. Soudain, un cri guttural déchire le silence. Ils sont là. Deux, trois, je ne sais pas, qui ont été alertés par nos pas et nos paroles. La lumière des lampes frontales attire les faux morts-vivants, qui à cette heure sont encore d'une grande fraîcheur et donnent de la voix. Mais surtout, ils courent et coursent. L'avantage de la jeunesse. 

Il ne fait pas bon tomber entre les pattes de ce primate qui déboule et finit en roulade. Opérant en solo, je veille à rester en amont ou dans le sillage d'autres "survivants", de façon à ne pas être la proie de ces monstres. Je connais les ouvrages néobrisaciens. Mais dans le noir, je ne sais plus. Un instant, je considère le ciel constellé de lumignons. La minute de contemplation dans ce jeu d'adolescents pour jeunes adultes. Un participant fonce pour ouvrir la voie à ses camarades. Les zombies, tout effrayants qu'ils soient, ne sont pas des surhommes. Il leur arrive de tomber et de reprendre leur souffle.

La chute. Voilà ce que je redoute le plus. Poursuivi par une ombre, voilà que je détale et manque de me retrouver en mauvaise posture. Pour être de Zomb'in the dark, il faut signer une décharge. Nous courons à nos risques et périls. Comme il est inconcevable de rebrousser chemin sans se jeter dans les bras des créatures, il faut faire le tour de l'étoile. La lueur annonce l'arrivée. Il faut valider l'accomplissement de la course. Il me manque plusieurs mots, mais j'ai coché deux balises spéciales et préservé mes deux langues colorées. Je les avais positionnées devant. J'apprendrai plus tard que mon parcours m'aura valu 65 points, loin des 99 des meilleurs, mais la dernière équipe a terminé dans le négatif ! 

Saint-Louis se dresse devant moi quand je sors de la partie. La ville s'est endormie mais les fossés sont toujours livrés aux personnages ensanglantés et joyeusement terrifiants. Un nouveau groupe de chasseurs de mots prend la relève. La nuit va être longue à Neuf-Brisach.





 





#zombinthedark #neufbrisach #citevauban #patrimoineunesco