1 juin 2020

SOUFFLE DE PENTECÔTE





Un symbole. La reprise des cultes pour la Pentecôte après plus de deux mois d'interdiction liée au confinement. Depuis une semaine en fait il était possible de célébrer un office, mais pour tout remettre en route, il faut apprendre à composer avec les normes en vigueur.
Nous avons eu la joie d'assister déjà à la messe du pèlerinage marial du Grünenwald. Ce matin, nous revenons pour la première fois depuis quelques semaines à Hindlingen. L'église Ste-Anne avait été rénovée avant le confinement. La fraîcheur des peintures, l'odeur de l'encaustique sur les bois, la douceur de la lumière. L'ornement rouge du lutrin nous rappelle la Pentecôte.
Une des solennités choisies pour la profession de foi. Il y a un peu plus de quarante ans, je renouvelais mes vœux de baptême en mon église Notre-Dame d'Altkirch, désormais bien souvent muette. Il ne reviendra plus le temps des processions de communiants.

Ste-Anne donc, dans la belle vallée de la Largue. Du gel hydroalcoolique et la corbeille à offrande à l'entrée, mais pas de signalétique tape-à-l’œil. Des croix figurent les places disponibles, un fléchage rouge le sens de circulation. Des mains courantes ont été installées dans le chœur qui faciliteront l'accès des prêtres à mobilité réduite.
Surtout, ce silence de cathédrale dans cette église de village. Une vingtaine de fidèles se sont figés dans l'attente de la célébration. La distanciation physique fait le vide. Les nouvelles de la commune ne sont plus échangées dans mon dos. 

Précédé de trois servants d'autel, le célébrant s'avance depuis le fond de l'église.
La chorale a disparu, l'orgue ne chante plus. Plus d'encens.
La Pentecôte commémore la fondation de l’Église universelle. Le prêtre fait le lien entre les apôtres confinés qui soudain sont marqués de l'Esprit Saint et les retrouvailles de la communauté paroissiale dans ce contexte particulier qui nous a privé des fêtes pascales.
Maintenant que la liturgie peut être partagée en fraternité restreinte, elle n'en demeure pas moins étrange. Réduite à la voix des participants, sans chants, sans musique.

La Pentecôte, c'est le souffle de Dieu. Cette année sur des fidèles qui ont le leur bridé, réunis le visage masqué.

24 mai 2020

LA MESSE DU DECONFINEMENT




Notre-Dame du Grünenwald. La chapelle des champs sur les hauteurs d'Ueberstrass. Je la fréquente depuis bientôt quarante ans, dans l'intimité d'une visite à Marie comme lors des vêpres et solennités.
Ce matin de mai, un office autorisé y est donné. Un écriteau l'annonce.
Pour la première fois depuis le 14 mars les célébrations religieuses avec fidèles peuvent de nouveau se tenir, sous réserve d'un cadre sanitaire strict.
Certains d'entre nous savaient. Nous serons moins de trente pour cette eucharistie de Covid-19. La tolérance est de quarante.
Un bénévole se tient à l'entrée avec son gel hydroalcoolique. La moitié des bancs est barrée au cordon rouge. Le masque obligatoire.
Ni orgue, ni chant.  Pas de servant d'autel. Le prêtre seul dans le chœur.
Il rayonne pourtant,  Justin, privé de ses paroissiens pendant deux mois. Il reconnaît des visages qu'il n'avait pas vus depuis janvier. La doyenne de l'assemblée disloquée aura 93 ans demain. Tous ont obéi aux règles. Les croyants pourront revenir aux cultes très rapidement.
Je suis au fond de la chapelle. Devant, s'élevant d'un tapis de fleurs, la statue de la Vierge les yeux au ciel, renvoie une image de sérénité.
Les fidèles n'ont pas changé. Ils ont changé de tête avec leurs masques.
C'est le mois de Marie. Le plus beau selon le cantique. La porte est restée ouverte, la sérénade des oiseaux est perceptible.
Je me souviens des célébrations qui remplissaient le bâtiment, des bancs déployés dehors et sur les côtés. Des arômes d'encens. De la chorale et de l'organiste. Sur le maître-autel, le cœur du curé Vincent.
L’Église jubile de pouvoir assurer de nouveau les cultes, légalement.
Justin compare l'instant au confinement des apôtres.
L'épreuve continue. Sur le chemin de la Pentecôte, qui commémore la naissance de l’Église. Il faudra du temps pour reconstruire. Mais la chapelle du Grünenwald fut remise debout après avoir été gravement meurtrie par la Grande Guerre.

Marie a le regard d'une femme bienheureuse. Les oiseaux chantent. Ce que les fidèles ne peuvent plus.
La messe est finie, un groupe de harleyistes se pose sur le parvis. Eux aussi ont une visite à honorer.