22 décembre 2018

LA FORET TOUJOURS (ENC)HANTEE



Décembre à Altkirch. Un soir de semaine humide. L'appel de la forêt. La Forêt enchantée. La signature altkirchoise pour le Noël alsacien. Au Pays des Chants et des Etoffes, une pérégrination urbaine dans des histoires pour enfants et plus grands. On nous a promis une nouvelle version. Allons voir. 





Depuis deux décennies, la Ville d'Altkirch peuple son centre et ses ronds-points de personnages et animaux grandeur nature. Dans ce Sundgau toujours hanté par des récits extraordinaires de maisons à colombages, la mémoire collective a toujours quelques faits singuliers à ressortir. Initiatrice et grande prêtresse de La Forêt enchantée, Geneviève Risterucci a été la metteuse en scène et la voix de cette animation de fin d'année. L'idée d'un univers fantasmagorique se fondant sur des légendes du terroir n'est pas contestable ; ce qui l'est, c'est sa mise en oeuvre pendant l'Avent et Noël. Quand toute l'Alsace se pare de lumière, que diable viennent  faire les monstres sur le chemin de la Nativité ? 




Je démarre par la rue des Boulangers, qui me renvoie quotidiennement cette vilaine fresque sur un immeuble vide et qu'aucun édile ne voudrait sûrement sur sa façade. Elle n'a rien à voir avec ladite Forêt quand bien même elle s'y intégrerait bien. 

Rue Hommaire-de-Hell, un personnage féminin isolé. Place Jourdain, un cavalier. Place Goutzwiller, la fontaine St-Morand est investie par un batracien géant. Autour de la fontaine de la Vierge, face à l'hôtel de ville, le petit marché des artisans et ses animaux de basse-cour. Cette année, La Forêt enchantée n'y existe guère plus. Mais un cabanon renferme un ogre forçant sur la charcuterie. 
Je passe par la rue de la Cure sans curé. La statue de saint Morand est toujours là. Elle a échappé au godet de pelle mais fait peine à voir. Le parvis de l'église est proche. A droite, un personnage de vieille femme qu'il ne ferait pas bon croiser sur un chemin. 
Sur le flanc droit de Notre-Dame, une succession de scènes, un monde de lutins, les Fouletots, un miroir déformant. 






Un peu plus loin, l'ancien parc de la caisse d'assurance-maladie. Un chapelet de panneaux met en garde contre des manifestations "paranormales". La petite maison abandonnée est le repaire d'une femme maléfique. Une réalisation qui se distingue des autres par son côté Halloween de gamins. A côté de la plaque (de signalisation). La formule change, les sorcières demeurent.





Il reste heureusement la cour du musée, dont les grilles s'ouvrent sur une sapinière. La Forêt enchantée, la voici. De nombreux habitants à pattes et à poils, des confiseries surdimensionnées, une curieuse maison, des enfants qui marchent sur un tapis de feuilles... C'est bien sûr Hansel et Gretel, que guette une autre femme mal intentionnée. Le mapping vidéo donne un surcroît de réalisme à l'ensemble. Le bruit des pas nous tient en haleine... C'est le conte que je retiendrai pour cette version revisitée de l'oeuvre de Geneviève Risterucci dont je n'entends plus la voix. Seule la musique lancinante coupe le silence de la nuit. 

La Forêt enchantée a été débarrassée de nombreux personnages, elle se construit autour de quelques contes. Mais ignore Noël. Pour les chrétiens, la lumière est promise au bout de la longue nuit. 
Dans le scénario altkirchois, on risque de marcher longtemps dans un mauvais rêve. 





















14 décembre 2018

DU RÊVE DE GOSSE AU MODÉLISME PREMIUM

     Destination Altkirch, capitale des trains d'Emma.




Depuis deux décennies il fait rêver le public familial dans la basse ville d'Altkirch avec sa Grotte aux Lucioles, transformant le pavillon familial en maison merveilleuse. Christophe Holbein s'est lancé un nouveau défi, en ouvrant un autre espace d'exposition consacré aux trains miniatures. Ces dernières années, le prestataire du marché de Noël de Montbéliard avait misé sur un local de la moribonde rue des Boulangers, où les commerces se comptent désormais sur les doigts d'une main. Il en a fait la boutique aux fées, avec les produits dérivés de l'avenue du 8e Hussards. Tout à côté, il a inauguré récemment "Le monde des trains d'Emma", dans un fonds naguère rempli de confiseries mais à l'abandon depuis belle lurette. Il a fallu tout refaire dans cette friche au rez-de-chaussée d'un collectif trentenaire. 

Christophe n'est pas un homme d'affaires, mais un entrepreneur aux yeux d'enfant qui croit dans sa ville plus que dans la Ville. Cette rue vivante au siècle dernier, il faut la réveiller, surtout qu'en face il lorgne sur la place des Abeilles, dont j'ignorais le nom, un comble pour un voisin ou presque. L'ancien parking de mon enfance devenu clos minéral offre un potentiel d'animation, mais il faut le débarrasser des conteneurs à déchets aussi esthétiques que des bunkers sur une plage. On ne parle pas des poubelles que les bouches métalliques ne peuvent engloutir. C'est sur cette placette donc que le faiseur de rêve envisage des manifestations en rapport avec ses thèmes, comme une bourse ferroviaire.



Mais entrons. A droite, à l'accueil, des boîtes de matériels roulants, des coffrets de départ, des miniatures. Christophe avertit qu'il ne tient pas une boutique ; il peut cependant procurer une pièce et s'occupe de la réparation de ces délicats trésors.
L'exposition se construit autour d'un imposant décor ayant nécessité d'importantes quantités de matériels sur lequel évoluent les trains de jardin Lehmann. Un travail titanesque de plusieurs semaines pour une équipe restreinte qui a ravi les représentants de Märklin, la marque - phare du lieu. S'il est question des trains d'Emma, c'est par référence à une vieille commerçante d'Elzach dans le Bade-Wurtemberg. Connue comme le train en fer blanc outre-Rhin, la spécialiste de la miniature ferroviaire travaille avec la famille Holbein depuis plus de dix ans. De sa caverne d'Ali Baba du rail, Christophe a rapporté des bijoux de ferrovipathes. Comme à la Grotte aux Lucioles, une multitude de personnages ajoutent à la mise en vie du diorama géant, dans des scènes réalistes, parfois insolites voire coquines. Le spectacle est partout, y compris le long des murs où les vitrines abritent des raretés. L'excellence Märklin, les lapins animés Duracell, les avions Schuco. Les locos tournent devant, derrière, au-dessus de nous. 






Pour les plus âgés, les souvenirs reviennent. J'ai, comme Christophe, grandi avec les trains. Je suis devenu modéliste ferroviaire voilà 40 ans. Je vis avec les TER dans mon quotidien.
Ici, pas besoin de pendule Ato de gare. Le temps n'a pas d'emprise sur ce pays magique où les trains arrivent à l'heure, qui n'est pas miné par un conflit SNCF, qui ne connaît pas les incidents de personne. C'est la bulle de Noël des petits et grands enfants. En cela, je recouvre mes images de préadolescent, rivé aux machines lancées dans leur ovale. C'était le Jouef jurassien. 

Dans les trains d'Emma, on est à l'heure allemande. Celle-là se moque du temps qui passe. 

En attendant, Christophe redynamise la rue à bon train.









#LesTrainsd'Emma 


Les Trains d'Emma, rue des Boulangers, 68130 Altkirch
Jusqu'au 6 janvier de 14 à 20H.