26 novembre 2018

CHAUSSURES HAAS : FRANCIS GROS, BON PIED BON OEIL




Rue Henriette, dans le plateau piétonnier du Vieux Mulhouse. Une enseigne que j'ai maintes fois vue sans m'y attarder depuis que je travaille dans la métropole haut-rhinoise, depuis 1991 donc. Surtout que pendant sept ans nous étions presque voisins, quelques dizaines de mètres nous séparant. 
Une actualité festive m'y conduit aujourd'hui : Chaussures Haas annonce un jubilé rare dans le commerce. 150 ans.
Je ne connais pas la boutique mais d'emblée je m'y sens bien. Derrière son comptoir qui me rappelle la caisse d'une boucherie des années 1970 dans ce centre-ville, un vieux monsieur sourit. C'est Francis Gros, le propriétaire. La quatrième génération d'une maison née dans ces murs. Particularité des fondations : les colonnes de fonte, toujours présentes. Sur les murs, de nombreux documents anciens égrènent la riche histoire de l'adresse. Et puis la place de la Réunion et ses automobiles, les commerçants d'hier. En noir et blanc, comme ce passé révolu. Les transformations du magasin au fil du temps. Ici on parle alsacien. Francis exhibe un alsatique d'expressions mulhousiennes. Je suis sundgauvien, on se comprend très vite.

J'ai aimé l'accueil. C'est un des fondamentaux de l'entreprise. Francis m'emmène dans les étages pour l'interview du grand anniversaire. Il voulait faire plaisir à son personnel, quatre vendeuses dont une totalise trente-cinq ans de service. Il savoure ce bonheur à 84 printemps. "La retraite n'existe pas chez les Haas", explique le commerçant en montrant ses aïeux. Mais après lui ? Il ne se fait pas trop de souci sur sa succession, concentré sur la satisfaction du client. Rue Henriette, on propose ce qu'il y a de mieux dans des marques qui ont elles aussi traversé les décennies, dans le moyen et haut de gamme. Formé à l'école de chaussure de Romans, Francis  embrassa une carrière de représentant avant de reprendre la maison familiale où il naquit et qu'il habita. 
Son bureau a pris de l'âge aussi. Mais tout semble à l'image des chaussures qu'il commercialise, à l'épreuve du temps.
Internet ? Les grandes surfaces spécialisées ? Francis n'en fait pas un drame non plus. Il en faut pour tous.
En redescendant, le chausseur reconnaît une cliente à l'accent alémanique. Il la salue amicalement. Tout cela, le commerce impersonnel ne pourra l'offrir. Et cette atmosphère vintage est délicieusement moderne.

24 novembre 2018

LA MAT EN QUÊTE DE RECONNAISSANCE




La route de Saint-Morand, je l'ai trop souvent prise, notamment en 1985, 1986 et 2014, années qui ont vu partir à cet endroit ma grand-mère, mon grand-père et papa. C'était chaque fois en fin d'année. J'appréhende cette période qui envoie un vent d'hiver sur les arbres, ce souffle de mort. Pourtant il fait beau ce samedi 24 novembre. Et presque doux. Des conditions idéales pour marcher.
Je marche vers mon hôpital de proximité. Je dois habiter à environ un kilomètre. Au loin, un puissant klaxon semble annoncer une opération escargot. Quand j'arrive sur les lieux, le bruit se rapproche. Trois tracteurs routiers apportent leur infernal soutien aux hospitaliers, tant pis pour les patients qui en prennent un peu pour leurs  oreilles. 







Sur le parvis de Saint-Morand, des centaines de personnes sont rassemblées autour des représentants de l'intersyndicale. On reconnaît nombre d'élus locaux et quelques parlementaires. Pas de blouse hospitalière, mais des t-shirts blancs. Les villages s'annoncent : Aspach, Carspach, Koestlach... Un demi-millier de personnes témoigne ici de son attachement à la maternité une fois de plus menacée. Jean-Luc Reitzer est là qui en tant que député-maire hier avait dû batailler pour la sauver. Mais c'est son successeur à la mairie Nicolas Jander qui parlera, succinctement, après la porte-parole des syndicats au nom des personnels du GHRMSA, cet ogre de santé appelé à absorber le service altkirchois mais aussi celui de Thann. Dans la vallée de la Thur simultanément, deux fois plus de monde est réuni pour les mêmes raisons. Fermer les maternités des deux encore sous-préfectures éloignera les parturientes de la salle d'accouchement. Un danger pour les mamans en devenir et leur enfant à naître. Sauf que la logique comptable prime depuis longtemps. Cette loi implacable qui méconnaît les réalités du terrain et du territoire.











Les discours sont brefs. Mais clairs. A présent, un cortège se forme qui va accomplir une boucle de quelques centaines de mètres en direction du rond-point de Leclerc. Le syndicat représentatif ouvre et ferme la marche. Au niveau de l'hypermarché la jonction se fait avec les gilets jaunes venus à sa rencontre. Les citoyens en lutte applaudissent les défenseurs de l'hosto qui auraient pu être plus nombreux pour un arrondissement de 70.000 patients potentiels. 
De jeunes mamans et des femmes enceintes sont de la sortie colorée par les bannières des centrales.
Quand la manifestation se disperse, les tracteurs camions font braire leurs avertisseurs.
Ça me rappelle le râle du vieil homme décédé dans cet hôpital qui me remit sur jambes.


















#sauverlamaternitéd'Altkirch