24 mai 2020

LA MESSE DU DECONFINEMENT




Notre-Dame du Grünenwald. La chapelle des champs sur les hauteurs d'Ueberstrass. Je la fréquente depuis bientôt quarante ans, dans l'intimité d'une visite à Marie comme lors des vêpres et solennités.
Ce matin de mai, un office autorisé y est donné. Un écriteau l'annonce.
Pour la première fois depuis le 14 mars les célébrations religieuses avec fidèles peuvent de nouveau se tenir, sous réserve d'un cadre sanitaire strict.
Certains d'entre nous savaient. Nous serons moins de trente pour cette eucharistie de Covid-19. La tolérance est de quarante.
Un bénévole se tient à l'entrée avec son gel hydroalcoolique. La moitié des bancs est barrée au cordon rouge. Le masque obligatoire.
Ni orgue, ni chant.  Pas de servant d'autel. Le prêtre seul dans le chœur.
Il rayonne pourtant,  Justin, privé de ses paroissiens pendant deux mois. Il reconnaît des visages qu'il n'avait pas vus depuis janvier. La doyenne de l'assemblée disloquée aura 93 ans demain. Tous ont obéi aux règles. Les croyants pourront revenir aux cultes très rapidement.
Je suis au fond de la chapelle. Devant, s'élevant d'un tapis de fleurs, la statue de la Vierge les yeux au ciel, renvoie une image de sérénité.
Les fidèles n'ont pas changé. Ils ont changé de tête avec leurs masques.
C'est le mois de Marie. Le plus beau selon le cantique. La porte est restée ouverte, la sérénade des oiseaux est perceptible.
Je me souviens des célébrations qui remplissaient le bâtiment, des bancs déployés dehors et sur les côtés. Des arômes d'encens. De la chorale et de l'organiste. Sur le maître-autel, le cœur du curé Vincent.
L’Église jubile de pouvoir assurer de nouveau les cultes, légalement.
Justin compare l'instant au confinement des apôtres.
L'épreuve continue. Sur le chemin de la Pentecôte, qui commémore la naissance de l’Église. Il faudra du temps pour reconstruire. Mais la chapelle du Grünenwald fut remise debout après avoir été gravement meurtrie par la Grande Guerre.

Marie a le regard d'une femme bienheureuse. Les oiseaux chantent. Ce que les fidèles ne peuvent plus.
La messe est finie, un groupe de harleyistes se pose sur le parvis. Eux aussi ont une visite à honorer.



2 mai 2020

LA CUISINE D'OLIVIER NASTI CHEZ VOUS

Photo Le Chambard




Quand j'ai appelé Olivier Nasti le 24 avril, il m'a confié que tout récemment, il s'était endormi heureux, ce qui arrive rarement par les temps qui courent, tant les lendemains sont chargés de nuages sombres. Lors de notre dernier entretien, un mois plus tôt, le chef doublement étoilé avait affiché un état d'esprit positif, sachant toutefois que la crise sanitaire allait nous coûter. Entre-temps, le 13 avril, Emmanuel Macron devant plus de 30 millions de Français, fixait un nouveau cap, le 11 mai, mais aucun pour l'hôtellerie – restauration. « Un coup de bambou » pour le commandant du Chambard et tout un secteur  qui plonge «  le moral dans les baskets ». On connaît l'hyperactivité d'Olivier, bien décidé à ne pas couler. « On est ruinés, mais on est aussi entrepreneurs. » La vente à emporter est une solution provisoire pour de nombreux restaurateurs. A Kaysersberg, Le Chambard a ouvert le 20 avril son drive gastronomique, annoncé comme le premier de France. Les lieux le permettent et la clientèle a répondu sans attendre. Des centaines de parts ont ainsi pu être livrées la première semaine. Olivier en appelle à l'indulgence de ses gourmets. Si on est habitué à l'excellence à table, le chef doit apprendre sur le tas un nouveau métier, notamment le conditionnement.Mais chaque jour apporte de l'amélioration, constate-t-il. La remise en route de la cuisine permet aussi de faire travailler une petite partie de l'effectif, 8 personnes. Un début. 

Olivier parlait dernièrement de cette dynamique à mettre en œuvre dans le territoire. S'il cuisine, c'est avec des produits locaux. Pas de poisson du grand large quand on a ce magnifique omble chevalier. Certes, le salmonidé est travaillé différemment pour le drive, en quenelles l'autre jour, pour en tirer le meilleur. Dans le nouveau service, il est difficile de faire de la gastronomie pure, explique Olivier ; si le travail reste technique et gustatif, le chef y voit surtout de la bistronomie. Même l'approvisionnement est complexe, ajoute-t-il.
Le drive du Chambard fonctionne tous les jours de 11H à 13H30 avec un menu renouvelé régulièrement. Pour les 2 et 3 mai, mousseline de brochet à l'oseille, riz sauvage ; pigeonneau de nid d'Alsace aux girolles et petits pois à la française ; premier miel de printemps des ruches de la maison. La formule drive a été précédée d'un service de livraison.

Photo Le Chambard


S'il défend la cuisine locavore, Olivier fait aussi travailler sa famille. Depuis Sausheim, son frère caviste (Emmanuel Nasti) assure un point-collecte et en profite pour suggérer l'accord mets – vins. Pour les gastronomes colmariens, un nouveau point-relais
vient d'être ouvert au Café Rapp, accessible de 10H30 à 12H. A Belfort aussi, au Bistroquet, près du cinéma.

La crise sanitaire, si ruineuse soit-elle, aura au moins fait voyager la cuisine du MOF de KB et fait de nouveaux adeptes. Qu'il faudra convertir en clients en salle demain.

Photo Le Chambard


#drivechambard